Uri Avnery et Adam Keller de Gush Shalom, le Bloc de la Paix Israélien , ont envoyé aujourd'hui une lettre ouverte aux Ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne qui doivent se réunir demain (6 septembre), les appelant à persister dans leur franche opposition à la construction de colonies dans les Territoires Occupés. Les comptes-rendus des médias indiquent que les colonies et les relations entre Israël et les Palestiniens figureront sans doute à l'ordre du jour, en même temps que des questions comme la situation en Syrie et en Egypte. “Nous aimerions que vous sachiez que beaucoup de personnes en Israël considèrent votre position contre les colonies comme étant l'expression d'une amitié et d'un intérêt véritables envers Israël” a déclaré la lettre de Gush Shal om. “Il est de l'intérêt d'Israël pour son existence d'accepter le fait que dans le monde d'aujourd'hui il est inacceptable de régner sur un autre peuple par la force, de confisquer la terre de ce peuple et de s'installer sur celle-ci. L' Union Européenne servirait mieux les véritables intérêts d'Israël en mettant l'accent, sans reculer, sur ce principe.
Voir le texte complet de la lettre :
Aux Ministres des Affaires étrangères et aux représentants de l'Union Européenne
Nous citoyens israéliens, profondément inquiets quant à l'avenir de notre pays et de notre région, vous adressons cette lettre avant la réunion du Conseil des Affaires étrangères de l'Union Européenne, qui doit avoir lieu le 6 septembre. Précisément nous vous écrivons en tant que membres de Gush Shalom, le Bloc de la Paix Israélien , un mouvement pacifiste populaire qui a été fondé en 1992.
Depuis lors notre mouvement a lutté pour jouer un rôle dans le système politique et pour faire avancer le thème de la paix entre Israël et ses voisins palestiniens et ses voisins arabes. C'est notre ferme conviction que la survie à long terme et la prospérité d'Israël dépendent de la capacité de notre pays à mener à bien son intégration dans la région. Un premier pas indispensable serait un retrait israélien des territoires occupés en 1967 et la création, en souffrance depuis longtemps, d'un État palestinien dans ces territoires.
Ces dernières années nous ont rendus de plus en plus inquiets devant la poussée du nationalisme expansionniste dans la société et le système politique israéliens. L'on donne souvent à de telles manifestations une justification religieuse par une interprétation tendancieuse et sélective des Écritures Juives. Les représentants de semblables tendances occupent des positions-clé dans les gouvernements qui se sont succédé, y compris le gouvernement actuel. Cet expansionnisme nationaliste se manifeste particulièrement par une détermination à conserver les territoires occupés depuis 1967 par les forces armées d'Israël et dans une campagne implacable pour maintenir et développer la colonisation israélienne dans ces territoires. Les colonies constituent non seulement une violation flagrante du Droit International et un obstacle majeur à ce qu'Israël parvienne à la paix avec ses voisins, mais aussi une partie importante des ressources économiques de notre pays est déversées dans le trou sans fond du projet colonial, au grand détriment de la société israélienne dans son ensemble.
Dans cette situation nous vous écrivons, en étant hautement au courant du rôle décisif que la Communauté Internationale en général et l'Union Européenne en particulier pourraient et devraient jouer. Particulièrement nous faisons référence à la résolution du Conseil des Affaires étrangères du 10 décembre 2012, dans laquelle l'UE a affirmé son engagement à“assurer que, conformément au Droit International, tous les accords entre l'État d'Israël et l'Union européenne doivent, sans équivoque et de façon explicite, indiquer leur inapplicabilité aux territoires occupés par Israël en 1967, à savoir les Hauteurs du Golan, la Cisjordanie y compris Jérusalem-Est et la Bande de Gaza”. En outre, nous faisons référence aggrave ; la directive publiée par la Commission Européenne cette année le 19 juillet, ayant pour but la mise en œuvre dans la pratique de la résolution ci-dessus.
Comme vous en êtes sans doute bien informés, la publication de la directive du 19 juillet a eu un impact en Israël beaucoup plus important que toute déclaration antérieure sur cette question –pour la simple raison que c'était la première fois que l'UE est allée au-delà d'une désapprobation verbale de la colonisation. Particulièrement, la participation d'Israël au Projet Européen d'Horizon 2020 a été liée à une déclaration explicite du gouvernement d'Israël d'adhésion aux principes ci-dessus.
Le Gouvernement Netanyahu est confrontéà un grave dilemme ayant en effet à choisir entre faire avancer le projet colonial ou obtenir les bénéfices très importants que la science, la vie universitaire et l'économie israéliennes pourraient tirer de la participation à Horizon 2020 – étant donné que les deux buts ont été amenés à s'exclure l'un l'autre.
Ainsi que cela a été publié dans les médias israéliens, le Gouvernement Netanyahu espère éviter ce dilemme en persuadant l'Union Européenne d'amender ou d'”adoucir” votre position. D'ailleurs, il y a eu des éléments, renvoyant à de telles approches adoptés par le Gouvernement d'Israël, figurant à l'ordre du jour de votre réunion du 6 septembre.
Nous aimerions que vous sachiez que beaucoup de personnes en Israël considèrent votre récente position, en l'état actuel, comme une expression d'amitié et d'intérêt véritables envers Israël. Il est vital pour Israël, notre pays, d'adopter les normes de conduite prédominantes parmi les Démocraties Occidentales, dont Israël aspire à faire partie. Il est de l'intérêt d'Israël pour son existence d'accepter le fait que dans le monde d'aujourd'hui il est inacceptable de régner sur un autre peuple par la force, de confisquer la terre de ce peuple et de s'installer sur celle-ci. L' Union Européenne servirait mieux les véritables intérêts d'Israël en mettant l'accent, sans reculer, sur ce principe.
Nous sommes bien conscients, que, ainsi que pour la question ci-dessus, vous êtes vivement inquiets quant à la situation dans d'autres pays de notre région –notamment la Syrie et l'Égypte, et que celles-ci doivent probablement figurer en bonne place à l'ordre du jour de votre réunion à venir. Il serait erroné d'avancer que tous les problèmes du Moyen-Orient découlent uniquement du conflit israélo-palestinien. Mais il serait tout à fait exact de dire que mettre un terme à l'occupation israélienne et apporter une solution à notre conflit de très longue durée pourrait exercer une influence positive et apaisante dans toute la région. Salutations
Uri Avnery
Adam Keller
Au nom du Mouvement Gush Shalom
Traduction Yves Jardin pour l'AFPS