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Hol­lande en Palestine, ce pays qui n'existe pas : ce qu'il n'a pas vu, je l'ai filmé

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En Palestine, Hol­lande n'a rien vu

Pour sa pre­mière visite dans un pays qui n'existe pas, la Palestine, le pré­sident Hol­lande a pris bien soin de ne pas s'écarter du décor de vitrine qui lui était offert.

Il a remarqué le déve­lop­pement éco­no­mique de Ramallah sans réa­liser que la capitale du futur État pales­tinien, malgré ses immeubles de bureaux vides dont les écrans publi­ci­taires LED cli­gnotent "coming soon", est encerclée de check points mili­taires israé­liens. Une capitale qui attend un pays. Et qui l'attendra encore long­temps.

"L'arrêt de la colo­ni­sation" ? Elle est déjà allée beaucoup trop loin

Le pré­sident français a demandé"l'arrêt défi­nitif de la colo­ni­sation" israé­lienne dans les ter­ri­toires pales­ti­niens. Même si elle devait cesser demain, elle a déjà réalisé son projet : redes­siner tota­lement l'avenir de la région.

Les colons ne sont plus, depuis long­temps, une minorité de barbus folk­lo­riques par­courant les pistes de Cis­jor­danie au volant de voi­tures hors d'âge, un M16 sur le siège arrière. Ils se sont dotés d'un mou­vement poli­tique puissant, Yesha, qui compte trois ministres majeurs au gou­ver­nement. Dont celui de la construction et du logement, Uri Ariel. Ils ont un ambas­sadeur inter­na­tional, Dani Dayan. Ce com­mu­ni­quant de talent oeuvre à convaincre les gou­ver­ne­ments étrangers que ce "conflit n'a pas de solution poli­tique et que pour l'instant, c'est le maximum qu'on puisse faire".

Yesha se bat pour le statu quo parce que ses membres savent que les faits sur le terrain prouvent qu'ils ont gagné. En tous cas pour l'instant.

Dans une bro­chure remise à Obama lors de sa visite en 2013, ils exposent leur projet avec une fran­chise désar­mante. S'ils occupent les col­lines de Palestine, c'est pour raisons mili­taires, pour empêcher que des Arabes les inves­tissent et menacent Israël. Ils doivent aussi contrôler les nappes aqui­fères. Et surtout, leur pré­sence doit prouver une fois pour toutes au monde que "l'existence d'un autre État à l'ouest du Jourdain n'est pas viable".

Israël contrôle tous les Ter­ri­toires pales­ti­niens

Au cours de l'enquête pour mon docu­men­taire "Voyage au coeur d'une guerre invi­sible" tourné pour Canal Plus, en juillet et sep­tembre 2013 (et qui sera diffusé lundi pro­chain), j'ai pu voir l'étendue concrète du triomphe de la colo­ni­sation.

C'est une véri­table matrice de contrôle qui qua­drille désormais tout l'espace ter­ri­torial pales­tinien. Chaque sommet est occupé par une colonie. Avec elles, vient la pré­sence de l'armée. Deux univers super­posés dans un même ter­ri­toire. Deux sys­tèmes de routes mor­cellent les ter­ri­toires pales­ti­niens. Les routes israé­liennes sont ouvertes aux véhi­cules à plaques vertes, pales­ti­niens, mais chaque voie de cir­cu­lation pales­ti­nienne est maî­trisée. La plupart des voies d'accès aux villes et vil­lages arabes sont dotées de grilles jaunes géantes.

Capture d'écran de "Voyage dans une guerre invi­sible" (P. Moreira)

Yehouda Shaul, ex-​​soldat devenu paci­fiste et qui a fondé"Breaking the silence" nous l'explique :

"Le niveau de vio­lence a baissé, donc il y a moins de res­tric­tions en ce moment. Mais le contrôle est désormais total. En 20 minutes, l'armée israé­lienne peut fermer toute la Cis­jor­danie. Une jeep par village, on ferme les grilles et c'est fini, per­sonne ne rentre et ne sort des villes et vil­lages."

Partout, le même cas de figure : les vil­lages pales­ti­niens des vallées sont étranglés. A Kafr Qadum, les Pales­ti­niens convoquent une émeute heb­do­ma­daire contre la sup­pression de leur route prin­cipale. Dans les vil­lages paysans arabes, les agri­cul­teurs se voient contester, mètre par mètre, leurs zones de pâturage ou d'agriculture par des colons des­cendus de leurs implan­ta­tions. Les attaques de colons radicaux sont quo­ti­diennes. Leur bas niveau d'intensité – pas ou peu de morts – leur permet de passer sous le radar.

Un immense sen­timent de frus­tration

Le seul élément nouveau – et qui risque à moyen terme de changer la donne –, c'est que les Pales­ti­niens ont troqué la kalach­nikov pour la caméra vidéo. Des cen­taines de vidéastes mili­tants docu­mentent les abus commis chaque jour par des colons. Ils montrent aussi comment ces agres­sions sont com­mises en pré­sence des soldats israé­liens dont le seul mandat est de pro­téger les colons, même lorsque ceux ci se livrent à des exac­tions.

Dans ce pays où les "nar­ra­tives", les inter­pré­ta­tions lan­ga­gières, par­viennent à tordre la réalité, la vidéo a un impact défla­grant.

Capture d'écran de "Voyage dans une guerre invi­sible" (P. Moreira)

A tel point que l'organisation paci­fiste israé­lienne Btselem en a dis­tribué près de 300 dans les ter­ri­toires pales­ti­niens. Des clips vidéos sont mis en ligne chaque jour.

Ces images ne font pas la une des journaux, mais elles sont désormais publiques. Elles racontent mieux que jamais l'état de frus­tration et d'injustice générés par la colo­ni­sation sur le terrain.

Cette réalité invi­sible, ceux qui en parlent le mieux sont les anciens des ser­vices de ren­sei­gnement israé­liens. Yuval Diskin, chef du Shin Bet jusqu'en 2011, a déclaré : "L'immense frus­tration des Pales­ti­niens est en train d'augmenter encore à mesure qu'ils réa­lisent qu'on leur a volé leur terre et que la pos­si­bilité d'un État pales­tinien se dissipe. Les condi­tions sont réunies pour une explosion de vio­lence."

"Voyage dans une guerre invi­sible" sera diffusé lundi 25 novembre 2013 sur Canal + à22H35


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