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Nelson Mandela, un héros encombrant pour Israël

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Lors de sa venue en Terre sainte, en 1999, Nelson Mandela avait-​​il été initié aux sub­ti­lités de la chutzpah, ce mélange d'impudence et d'assurance qui a rang de vertu nationale, ou presque, en Israël ? Si oui, on peut penser sans trop de risque de se tromper que le mot lui est venu à l'esprit depuis le Pan­théon des libé­ra­teurs, où il repose main­tenant, en entendant les res­pon­sables israé­liens faire son éloge.

Car les mots du premier ministre israélien Benyamin Néta­nyahou, qui a salué un " com­battant de la liberté, opposéà la vio­lence ", comme ceux du pré­sident Shimon Pérès, qui a applaudi sa contri­bution à" la guerre contre les dis­cri­mi­na­tions et le racisme ", pro­cèdent d'une réécriture de l'Histoire pour le moins auda­cieuse. Un coup de pub destinéà faire oublier l'alliance mili­taire secrète que l'Etat juif noua avec le régime ségré­ga­tion­niste de Pre­toria durant les années 1970 et 1980 et que ses diri­geants, depuis, n'ont jamais admise et encore moins désa­vouée. Ce pacte scellé sous les aus­pices de Shimon Pérès, alors ministre de la défense, au nom de la lutte contre le " ter­ro­risme ", incarné alors par l'ANC de Nelson Mandela et l'OLP de Yasser Arafat, aboutit notamment à cette scène sidé­rante : la venue en 1976, à Yad Vashem, le mémorial de la Shoah de Jéru­salem, d'un supré­ma­ciste blanc et sym­pa­thisant nazi notoire, en la per­sonne de Bal­thazar Johannes Vorster, le premier ministre sud-​​africain de l'époque.

Confrontéà la résur­gence de cet embar­rassant passé, lon­guement évoqué par la presse israé­lienne, Benyamin Néta­nyahou a sûrement jugé plus judi­cieux de faire profil bas. Pré­textant des frais de dépla­cement trop élevés, il a renoncéà par­ti­ciper à la céré­monie d'hommage orga­nisée, mardi 10 décembre, dans le stade de Soweto. Bonne idée.

Sur place, les vétérans de l'ANC auraient pu lui rap­peler que " Madiba " n'a jamais été un héraut de la non-​​violence, contrai­rement à ce que M. Néta­nyahou laissait entendre dans sa décla­ration, calibrée pour gêner ses adver­saires pales­ti­niens. Bien que le mou­vement anti­apar­theid n'ait pas sombré dans le ter­ro­risme aveugle, M. Mandela n'a jamais accepté de renoncer à l'option de la vio­lence, même en échange de sa libé­ration. " C'est tou­jours l'oppresseur, non l'opprimé, qui détermine la forme de la lutte, écrivait-​​il dans ses Mémoires. Si l'oppresseur utilise la vio­lence, l'opprimé n'a pas d'autre choix que de répondre par la violence. "

En Afrique du Sud, M. Néta­nyahou aurait pu faire d'autres expé­riences incon­grues. Comme ren­contrer Ahmed Kathrada, 82 ans, un ancien com­pagnon de prison de Nelson Mandela, qui a pris la tête d'une cam­pagne inter­na­tionale pour la libé­ration de Marouane Bar­ghouti. Condamnéà la prison à vie pour son impli­cation sup­posée dans le meurtre de cinq Israé­liens, ce haut diri­geant du Fatah, par­tisan déçu du pro­cessus de paix, est considéré dans les ter­ri­toires occupés comme le Mandela palestinien.

Mais le plus déplaisant pour le premier ministre israélien aurait été de croiser Ismaïl Coovadia, l'ancien ambas­sadeur d'Afrique du Sud en Israël. En juin, quelques mois après avoir quitté son poste, ce diplomate avait estimé que le com­por­tement d'Israël en Cis­jor­danie et dans la bande de Gaza s'apparentait à une " réplique de l'apartheid ". Un accès de chutzpah, assurément.

Publié par Le Monde


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