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Gaza : le statu quo n'est plus une option. L'UE doit se dépêcher d'agir pour mettre fin au bou­clage et au climat d'impunitéà Gaza

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En tant qu'organisations inter­na­tio­nales et européennes de développement et de défense des droits de l'Homme, nous nous inquiétons de la détérioration de la situation huma­ni­taire dans la bande de Gaza occupée, ainsi que du piètre respect des droits de l'Homme. Alors que l'UE discute actuel­lement d'une poli­tique conjointe vis-à-vis de Gaza, nous demandons à l'Union européenne d'exhorter Israël à lever le bou­clage illégal de la bande de Gaza. L'UE devrait également exiger de toutes les parties qu'elles res­pectent leurs obli­ga­tions en vertu du droit international.

Le bou­clage de la bande de Gaza par Israël se poursuit et affecte 1,7 million de Pales­ti­niens, en totale vio­lation du droit huma­ni­taire inter­na­tional. La des­truction par les autorités égyptiennes des tunnels de contre­bande entre l'Égypte et Gaza depuis juin 2013 n'a par ailleurs fait qu'accentuer les pénuries. La mul­ti­pli­cation des attaques transfrontalières par l'armée israélienne et des groupes armés pales­ti­niens ces dernières semaines a aggravé une situation déjà précaire dans la bande de Gaza et fait craindre un nouveau conflit. L'impact du bou­clage et de la vio­lence sur les droits de la popu­lation à la vie, à la santé, à l'éducation, à l'alimentation, à l'eau et à un niveau de vie suf­fisant n'a jamais été plus fla­grant. Tous les civils, Pales­ti­niens et Israéliens, devraient pouvoir vivre en sécurité, sans crainte et sans attaque, protégés par l'État de droit. Le meilleur moyen de garantir la sécurité demeure de prendre des enga­ge­ments, d'ouvrir le dia­logue et de res­pecter les normes rela­tives aux droits de l'Homme, et non pas de miser sur l'isolement et les sanctions.

Gaza s'apprête à entamer sa huitième année consécutive de bou­clage par Israël et ces années de res­tric­tions à l'importation et à l'exportation ont mis en péril ses infra­struc­tures de base. Les sec­teurs de l'agriculture et de la fabri­cation ont été particulièrement touchés à Gaza. Le taux de chômage a grimpé à32,5 % au troisième tri­mestre de 2013 et les chiffres du quatrième tri­mestre devraient être encore plus élevés. La crois­sance économique limitée a donné lieu à une dépendance accrue et inte­nable vis-à-vis de l'aide huma­ni­taire. Récemment, le gou­ver­nement néerlandais a fait don d'un nouveau scanner à l'Autorité pales­ti­nienne, afin de faci­liter l'exportation de mar­chan­dises à partir de Gaza, tout en prenant en compte les inquiétudes d'Israël en matière de sécurité. Tandis qu'un nombre limité de pro­duits sont exportés vers l'Europe, les autorités israéliennes conti­nuent d'interdire le transfert de mar­chan­dises de Gaza vers la Cisjordanie.

Les autorités égyptiennes ont quant à elle détruit la plupart des tunnels de contre­bande des­quels Gaza dépendait de plus en plus, au motif que leurs opérations mili­taires sont nécessaires pour la sécurité nationale de l'Égypte. Elles ont également limité la cir­cu­lation des per­sonnes au point de passage de Rafah. Au cours des mois qui ont suivi la des­ti­tution de Mohamed Morsi en juillet 2013, les postes de contrôle, le per­sonnel de sécurité et les bâtiments du gou­ver­nement en Égypte ont fait l'objet de plus en plus d'attaques perpétrées par des groupes qualifiés de « ter­ro­ristes » par les autorités égyptiennes. Le pays tout entier est secoué par la vio­lence, la région du nord du Sinaï étant particulièrement touchée. Les mesures prises par les autorités égyptiennes ont accentué les pénuries de mar­chan­dises (notamment de car­burant et de matériaux de construction) à Gaza, laissant des mil­liers de Gazaouis attendre des semaines, voire des mois, avant de pouvoir se rendre en Égypte ou ailleurs à l'étranger pour suivre des études ou bénéficier d'un trai­tement médical. Fin 2013, les pénuries de car­burant ont entraîné la fer­meture prolongée de la seule cen­trale électrique de Gaza, ce qui a mis en péril les ser­vices cru­ciaux de dis­tri­bution d'eau, d'assainissement et de soins de santé.

Cer­tains patients, en raison de l'absence de ser­vices adaptés à Gaza suite à des décennies d'occupation, doivent suivre un trai­tement médical en Cis­jor­danie ou à l'étranger et leur situation est particulièrement préoccupante. En décembre 2013, l'OMS a fait état d'une pénurie de 30 % des médicaments et de 50 % des articles médicaux jetables. Elle a exprimé ses inquiétudes quant à l'incapacité crois­sante des infra­struc­tures de santé fra­giles à faire face à ces graves pénuries. Les patients doivent par ailleurs souvent attendre long­temps avant d'obtenir un permis les auto­risant à tra­verser le point de passage d'Erez vers Israël. Ces pra­tiques mettent en danger la vie des patients et enfreignent leur droit à la santé. Des patients ont été arrêtés et interrogés par les autorités israéliennes à plu­sieurs reprises. Depuis le début de l'année 2013, au moins huit patients ont été retenus pri­son­niers au point de passage d'Erez. Dans la mesure où d'importantes res­tric­tions sont également imposées par l'Égypte au point de passage de Rafah, cer­tains patients nécessitant un trai­tement médical d'urgence sont exposés à des risques inutiles.

Selon les chiffres du BCAF, en 2013, cinq civils pales­ti­niens ont été tués et 66 autres, dont 20 enfants, ont été blessés dans les zones d'accès limité de Gaza, ou « zone tampon1», sur terre et en mer. Le 24 janvier 2014, les forces israéliennes ont abattu un civil pales­tinien qui pro­testait près de la frontière à Bet Lahia et en ont blessé plu­sieurs autres. Les pêcheurs gazaouis font eux aussi fréquemment l'objet d'attaques de la part d'Israël. Depuis le début de l'année 2014, au moins cinq inci­dents impli­quant des coups de feu contre des bateaux de pêche ont été signalés dans la limite des 6 milles nautiques.

Cinq ans après la fin de l'opération « Plomb durci », le conflit de 22 jours lors duquel des cen­taines de civils ont perdu la vie à Gaza, Israël n'a tou­jours pas dûment enquêté sur les accu­sa­tions portées à l'encontre de ses forces mili­taires et il n'a entamé aucune pour­suite pour vio­la­tions du droit inter­na­tional des droits de l'Homme et du droit huma­ni­taire international.2 Cette absence d'imputabilité ren­force le climat d'impunité existant, comme l'a démontré le déroulement en novembre 2012 de l'opération « Pilier de défense », lors de laquelle plus de 100 civils pales­ti­niens ont été tués en huit jours. Les vic­times pales­ti­niennes n'ont par ailleurs tou­jours pas accès aux tri­bunaux israéliens et à des recours effectifs, en raison de l'imposition par Israël de barrières juri­diques, admi­nis­tra­tives, financières et phy­siques. L'administration de facto du Hamas n'enquête pas non plus sur les tirs aveugles de roquettes de Gaza vers Israël, un crime de guerre qui a mis en danger les civils des deux côtés de la frontière. Aucune pour­suite n'a été lancée dans ce contexte.

Bien qu'Israël ait le droit de vérifier qu'aucune arme n'entre ou ne sort de Gaza, il se borne à ne pas res­pecter ses obli­ga­tions de puis­sance occu­pante, à savoir garantir la sécurité et le bien-​​être de la popu­lation occupée et res­pecter leurs droits, en raison de sa poli­tique globale de bou­clage, malgré quelques chan­ge­ments ces dernières années. Israël continue de limiter la cir­cu­lation de la popu­lation, ce qui s'apparente à une punition col­lective, dans une mesure qui dépasse de loin celle nécessaire pour garantir sa sécurité. L'objectif explicite et punitif de la poli­tique de bou­clage d'Israël est de conso­lider la séparation entre la bande de Gaza et la Cis­jor­danie, considérées comme un seul ter­ri­toire par le droit huma­ni­taire inter­na­tional. Il est du devoir d'Israël de protéger ses civils, mais elle est tenue de plei­nement res­pecter les règles du droit inter­na­tional des droits de l'Homme et du droit huma­ni­taire inter­na­tional, y compris l'obligation de tou­jours opérer une dis­tinction entre les civils et les com­bat­tants, de ne pas lancer des attaques aveugles et d'éviter d'avoir recours à des muni­tions réelles. Bien qu'Israël, en tant que puis­sance occu­pante, doive assumer la res­pon­sa­bilité prin­cipale du bien-​​être de la popu­lation civile à Gaza, l'Égypte est quant à elle tenue de ne pas imposer de res­tric­tions arbi­traires et dis­cri­mi­na­toires à la liberté de cir­cu­lation des Gazaouis. Au vu de la gravité de la situation sur le plan huma­ni­taire dans la bande de Gaza, l'Égypte devrait également tra­vailler avec les parties pre­nantes concernées pour s'assurer que les besoins de la popu­lation sont pris en compte. L'Autorité pales­ti­nienne doit elle aussi assumer des responsabilités vis-à-vis des résidents de la bande de Gaza et elle reçoit d'ailleurs des fonds de la part de bailleurs inter­na­tionaux pour remplir ce rôle. Enfin, le Hamas, l'autorité de facto de la bande de Gaza, est dans l'obligation de res­pecter le droit cou­tumier international.

Nous demandons à toutes les parties de res­pecter l'ensemble des dis­po­si­tions du droit huma­ni­taire inter­na­tional et du droit inter­na­tional des droits de l'Homme, ce qui implique notamment de mettre un terme aux attaques prenant des civils pour cibles.

Les droits de 1,7 million de per­sonnes dans la bande de Gaza ne sont plus respectés depuis des années. Le respect du droit inter­na­tional, la pro­tection des civils et la levée du bou­clage par Israël, ainsi que le maintien et le ren­for­cement des liens exis­tants entre la bande de Gaza et la Cis­jor­danie, consti­tuent des étapes essen­tielles pour remédier à cette situation. L'UE se doit de jouer un rôle constructif dans ce contexte et elle ne devrait pas attendre l'issue des négociations de paix israélo-palestiniennes pour faire res­pecter le droit inter­na­tional. En tant qu'organisations de développement et de défense des droits de l'Homme, nous insistons sur la nécessité d'une col­la­bo­ration entre tous les acteurs concernés dans l'intérêt de la popu­lation civile de la bande de Gaza.

1*La zone tampon s'étend tout le long des frontières ter­restres et mari­times de la bande de Gaza. Cette zone est interdite aux Pales­ti­niens et est surveillée par des patrouilles mili­taires israéliennes. La délimitation précise de cette zone est chan­geante et le manque de clarté à ce propos pose un important problème de sécurité pour les civils pales­ti­niens. Dans le sillage de l'accord de cessez-​​le-​​feu du 21 novembre 2012 qui a mis fin à l'opération « Pilier de défense », les res­tric­tions mari­times ont été portées à6 milles nau­tiques. Sur terre, la zone d'accès interdit s'étend de 100300 mètres à partir du mur israélien. En pra­tique, les autorités israéliennes ont imposé une « zone interdite » dans un rayon de 500 mètres à partir du mur, et une « zone à haut risque » pouvant s'étendre jusqu'à un rayon de 1500 mètres. 2*Plusieurs organes de l'ONU ont docu­menté les lacunes législatives, struc­tu­relles et opérationnelles du système d'enquête mili­taire israélien, comme l'a confirmé le Comité d'experts indépendants de l'ONU le 18 mars 2011.

Les orga­ni­sa­tions signa­taires de la présente déclaration exhortent l'UE

1. fonder ses rela­tions bilatérales avec Israël sur le respect du droit inter­na­tional et à s'assurer que ses lignes direc­trices sur la pro­motion du droit huma­ni­taire inter­na­tional sont mises en œuvre par Israël et toutes les parties pre­nantes. 2.Elles exhortent Israël à : 2.1 lever immédiatement, tota­lement et sans condition le bou­clage de la bande de Gaza, et notamment à :
- lever les res­tric­tions générales et disproportionnées en matière de cir­cu­lation des per­sonnes, y compris entre Gaza et la Cis­jor­danie ;
- faci­liter le com­merce ou le transit des mar­chan­dises de Gaza vers la Cis­jor­danie et Israël ;
- faci­liter l'entrée de matériaux de construction et de matières premières sur le ter­ri­toire, y compris pour le secteur privé, en développant les opérations aux points de passage ;
- garantir l'accès aux terres agri­coles de Gaza, y compris les zones proches des frontières et les zones de pêche, ainsi que la pro­tection des civils à ces endroits ;
- faci­liter la sortie des patients nécessitant un trai­tement médical en dehors de Gaza. 2.2 s'assurer que les vio­la­tions du droit huma­ni­taire inter­na­tional et du droit inter­na­tional des droits de l'Homme par ses forces de sécurité à Gaza fassent l'objet de pour­suites, en menant des enquêtes conformes aux normes inter­na­tio­nales, y compris lorsque des civils sont tués, et en pour­suivant les res­pon­sables. 2.3 s'assurer que les vic­times pales­ti­niennes des vio­la­tions du droit inter­na­tional par Israël bénéficient d'un accès adéquat aux tri­bunaux israéliens, ainsi qu'à des recours effectifs. 3. Elles exhortent l'Égypte à faci­liter la cir­cu­lation des résidents de Gaza au point de passage de Rafah et à garantir le passage sans encombre de l'aide huma­ni­taire. 4.Elles exhortent l'Autorité pales­ti­nienne à s'assurer que les acteurs pales­ti­niens non étatiques res­pectent les règles du droit inter­na­tional et à ren­forcer sa coopération avec toutes les parties pre­nantes, afin que la bande de Gaza puisse bénéficier d'un appro­vi­sion­nement stable en car­burant indus­triel et en médicaments de première nécessité.

Co-signée par les orga­ni­sa­tions inter­na­tio­nales et européennes de droits de l'Homme et de développement sui­vantes : 1. ACSUR Las Segovias 2. ARCI asso­cia­zione di pro­mo­zione sociale 3. Amnesty International-​​ European Ins­ti­tu­tions Office 4. Broe­delijk Delen 5. CCFD-​​ Terre Soli­daire 6. CNCD-11.11.117. Dignity-​​Danish Ins­titute Against Torture 8. Euro Medi­ter­ranean Human Rights Network (EMHRN) 9. Fede­racion DDH10. Greek Com­mittee for Inter­na­tional Demo­cratic Soli­darity (EEDDA) 11. Ligue des droits de l'Homme 12. Trocaire


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