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Les réfugiés palestiniens otages du conflit syrien

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Entraînés dans une guerre qui ne les concerne pas, les réfugiés pales­ti­niens du camp de Yarmouk sup­portent le siège de l'armée de Bachar Al Assad depuis sept mois. Des dizaines de cas de décès dus à la mal­nu­trition ont été rapportés.

Dans un décor d'apocalypse, les enfants se nour­rissent d'herbe et de carton. Après un siège de sept mois organisé par le pouvoir syrien, les Pales­ti­niens du camp de réfugiés de Yarmouk, au sud de Damas, meurent d'une guerre qui ne les concerne pas. Depuis le 8 février, aucune aide ali­men­taire n'est par­venue aux habi­tants, pris en otage dans un pays qui n'est pas le leur. Avant le début du conflit syrien, ce camp, sorti de terre en 1957, abritait 250000 réfugiés pales­ti­niens et civils syriens ; ils ne sont plus que 18000 aujourd'hui à n'avoir pu fuir les combats entre l'insurrection syrienne ou étrangère et le régime de Bachar Al Assad. Entre snipers et tirs de mortier. Samedi, l'Agence des Nations unies pour l'aide aux réfugiés pales­ti­niens (UNRWA) a exhorté l'ensemble des parties à auto­riser l'accès au camp pour des raisons huma­ni­taires. Dans le cas contraire, elle prédit un désastre.

Un accord avec les factions palestiniennes

Des dizaines de cas de mort de mal­nu­trition ont été rap­portés, l'accès aux soins est inexistant et les condi­tions d'hygiène catas­tro­phiques. Dès le len­demain, la rébellion a entamé son retrait du camp suite à un accord avec les fac­tions pales­ti­niennes. « Des com­bat­tants pales­ti­niens se sont déployés dans les environs du camp pour empêcher l'entrée de tout homme armé non pales­tinien », a expliqué Anwar Abdel Hadi, un res­pon­sable de l'Organisation de libé­ration de la Palestine (OLP). Dès décembre 2012, l'Armée syrienne libre (ASL) uti­lisait le camp de Yarmouk comme base arrière, plus tard suivie par les isla­mistes du Front al-​​Nosra. L'ASL cherche éga­lement à com­battre la faction mino­ri­taire du Front popu­laire pour la libé­ration de la Palestine-​​Commandement général, acquise au régime de Damas car créée par Hafez Al Assad en 1968, qui a tenté de prendre le contrôle de Yarmouk. En vain, l'OLP pré­férant rester à l'écart de la guerre.

270000 Palestiniens de Syrie seraient sans abri

« Bien que les signes de danger pour les réfugiés pales­ti­niens eussent été très évi­dents, il a fallu du temps avant que les res­pon­sables pales­ti­niens ne décident de négocier un statut spécial, l'espoir pour le camp de réfugiés de Yarmouk de rester en dehors du conflit syrien. Il y a eu accord pour que les réfugiés ne soient pas uti­lisés comme chair à canon dans la guerre syrienne, mais toutes les ten­ta­tives pour l'appliquer et main­tenir l'accord ont échoué jusqu'à présent », écrit l'auteure pales­ti­nienne Rana Abdulla. De leur côté, le djihad isla­mique et le Hamas sou­tiennent l'insurrection syrienne, ren­forçant à Damas le sen­timent d'avoir à faire, côté pales­tinien, à un ennemi de l'intérieur.

Depuis 2011, 270000 Pales­ti­niens de Syrie seraient sans abri dans le pays, 80000 se seraient réfugiés au Liban, 11000 en Jor­danie et 5000 en Égypte. En décembre dernier, l'UNRWA sou­li­gnait que « ceux qui ont atteint le Liban, la Jor­danie et l'Égypte font face à un risque de vide juri­dique aggravé par des condi­tions de vie si dif­fi­ciles que beaucoup décident de rentrer malgré les dangers à l'intérieur de la Syrie ». À plu­sieurs reprises, le Liban a empêché des réfugiés pales­ti­niens de trouver refuge sur son ter­ri­toire. Une « vio­lation très claire du droit inter­na­tional qui garantit à toute per­sonne qui fuit une zone de guerre de trouver un abri tem­po­raire », selon Human Rights Watch. Coincés à la fron­tière, les réfugiés affrontent un autre risque : celui d'un hiver souvent glacial dans ces zones montagneuses.

Dans l'ensemble de la région, les réfugiés pales­ti­niens restent perçus comme une menace pour l'équilibre démo­gra­phique, éco­no­mique voire poli­tique. Le drame qui se joue actuel­lement continue de poser la question du droit au retour des réfugiés pales­ti­niens, prévu par la réso­lution 194 des Nations unies mais jamais appliqué par Israël.

Réfugiés en Syrie, les Pales­ti­niens sont avant tout des apa­trides, ne jouissant d'aucune pro­tection réelle depuis le début de la guerre civile. Pour le bureau national de l'Association France-​​Palestine Soli­darité, qui mobilise son fonds SOS Palestine afin de débloquer une aide à Yarmouk, « contrai­rement à ce que cer­tains vou­draient croire ou faire croire, la question des réfugiés pales­ti­niens ne pourra être éter­nel­lement éludée. Elle est une clé du conflit israélo-​​palestinien et de l'équilibre régional ».

Le chef de l'Armée syrienne libre (ASL) Limogé Selim Idriss, accusé de passer plus de temps dans les palaces d'Istanbul que sur le terrain, a été limogé dimanche de son poste de chef d'état-major de l'ASL par le Conseil mili­taire supé­rieur (CMS) qui dirige cette orga­ni­sation créée à l'origine par des déser­teurs de l'armée de Bachar. Idriss a été rem­placé par le bri­gadier général Abdel Al Ilah Al Bachir, chef mili­taire de la région de Kou­neitra. En perte de vitesse face aux isla­mistes et dji­ha­distes ces der­niers mois, qui l'ont sup­plantée dans la plupart des zones de combat, l'ASL avait reçu un sérieux coup en décembre dernier lorsque Washington et Londres avaient décidé de sus­pendre leurs aides non létales, après la prise de sièges de l'ASL et de ses dépôts d'armes par les isla­mistes du Front al-​​Nosra et de l'EIIL (État isla­mique en Irak et au Levant) dans le nord de la Syrie (fron­tière turque). En décidant de la quitter, le Front isla­mique, coa­lition de six groupes armés, lui a peut-​​être assené le coup le plus dur. Et de fait, l'ASL n'est plus que l'ombre de ce qu'elle a été il y a deux ans.

Lina Sankari

Publié par L'Humanité


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