Une semaine après la formation d'un gouvernement de consensus palestinien, le Fatah et le Hamas se disputent autour de la question du paiement des fonctionnaires. Des échauffourées ont éclaté la semaine dernière dans la bande de Gaza. Résultat, le Hamas a ordonné la fermeture des banques dans le territoire palestinien, provoquant la colère d'une partie de la population.
- Le président palestinien Mahmoud Abbas et son Premier ministre Rami Hamdallah à Ramallah le 2 juin 2014.REUTERS/Majdi Mohammed/Pool
Avec notre envoyée spéciale à Gaza,
Un attroupement s'est formé devant la Bank of Palestine, à Gaza. Une femme, habillée à l'occidentale et coiffée d'un simple voile jaune, harangue la foule. « Hamdallah, menteur ! Mechaal, vendu ! », crie-t-elle sous le regard attentif des policiers du Hamas. Safia al Najar, qui se présente comme une militante politique, s'en prend au Premier ministre palestinien, Rami Hamdallah, et au chef du Hamas, Khaled Mechaal. L'objet de sa colère : la fermeture des banques, ordonnée par le Hamas qui empêche les fonctionnaires de l'Autorité palestinienne de venir toucher leur salaire.
Mercredi dernier, ces fonctionnaires devaient normalement retirer leur paie, mais ils ont été pris à partie par les employés du gouvernement du Hamas, mécontents de ne toucher que partiellement leur salaire, faute d'argent dans les caisses. Avec la formation d'un gouvernement de consensus, soutenu par le Hamas au pouvoir à Gaza et le Fatah, en Cisjordanie, les fonctionnaires du Hamas espéraient être payés désormais par le nouveau cabinet, àégalité avec leurs collègues de l'Autorité palestinienne. Mais les choses ne se règlent pas en une semaine.
Fatah et Hamas se renvoient la balle
Les responsables politiques se renvoient les responsabilités. « Cette crise, c'est de la faute de Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne et du Premier ministre Hamdallah , accuse Fawzi Barhoum, porte-parole du Hamas à Gaza, il faut qu'ils tiennent leur promesses, que le nouveau gouvernement paient tous les fonctionnaires ». Tant que ce ne sera pas fait, les banques resteront fermées.
Ibrahim Abou Nadja, un des responsables du Fatah à Gaza, réclame du temps pour que le nouveau gouvernement étudie les dossiers des fonctionnaires. Et il accuse le mouvement islamiste : « Le Hamas fait monter la pression, il a toujours le contrôle sur la bande de Gaza, il ne veut pas lâcher le pouvoir ! ».
Même si le Hamas affirme avoir transféré ses pouvoirs au nouveau gouvernement formé le 2 juin, sur le terrain le mouvement islamiste semble toujours à la manœuvre. La sécurité de Gaza, notamment, est toujours entre ses mains. Dans les rues, la fermeture des banques inquiète. « Comment va-t-on payer le loyer, les crédits, la nourriture ? », s'interroge une fonctionnaire de l'Autorité palestinienne qui attend devant une succursale fermée.
« On ne sait pas où on va »
Au souk, près de la place Palestine, les commerçants rongent aussi leur frein. « On ne vend plus rien depuis que les banques ont fermé. Les fonctionnaires sont nos principaux clients. Déjà que la situation n'était pas bonne, là c'est pire. On attendait une amélioration avec le nouveau gouvernement d'unité, mais c'est le contraire qui se passe », résume le propriétaire d'une boutique d'accessoires.
Ahmed, un ingénieur de 30 ans, est lucide. Il estime que la réconciliation entre les deux frères ennemis n'était qu'une alliance de circonstance. « Le Hamas était isolé, n'avait plus d'argent. Le Fatah a vu le processus de paix échouer. Il ne restait plus que la réconciliation ». Mohammed, lui, s'inquiète : « Le Fatah et le Hamas ne s'aiment pas, on ne sait pas où on va ». Craint-il des violences ? « J'espère qu'on ne va pas revivre la période de 2007. Beaucoup de sang a coulé, on en a assez ». Une semaine après sa formation, le nouveau gouvernement palestinien est mis à l'épreuve. Déjà le conseil des ministres n'arrive pas à se réunir. Israël a interdit à ses membres de se déplacer entre Gaza et la Cisjordanie. L'unité palestinienne n'avait pas besoin de cette crise.