Ramallah occupée, 5 juin 2014 – Les détenus administratifs palestiniens entrent aujourd'hui dans leur 43ème jour de grève de la faim illimitée qui a été lancée pour protester contre la politique de détention administrative, tandis que les institutions et organismes internationaux, tout comme l'Autorité Palestinienne, continuent à négliger de faire pression sur la Puissance Occupante pour protéger les grévistes de la faim.
Addameer pense que ce silence contribue à l'absence de réponse de la Puissance Occupante aux demandes des grévistes de la faim. Cela est le cas dans deux situations extrêmement dangereuses : premièrement, le Service des Prisons Israélien (SPI) a informé le comité des grévistes de la faim qu'il n'est pas en son pouvoir de négocier avec les grévistes de la faim, et deuxièmement, la Puissance Occupante s'efforce faire adopter une loi qui permettra d'alimenter de force les grévistes de la faim.
Bien que l'Association Médicale Israélienne soit fermement opposée à ce projet de loi sur l'alimentation forcée, le Premier Ministre Benjamin Netanyahou a récemment déclaré que l'on trouvera des médecins israéliens pour mettre à exécution l'alimentation forcée et a aussi déclaré que le processus pour faire adopter la loi sur l'alimentation forcée sera accéléré dans le but de résoudre le problème des actuels grévistes de la faim. Si ce projet est vraiment adopté en tant que loi, il aurait de graves implications car selon la Déclaration de Malte de l'Association Médicale Mondiale sur les Grévistes de la Faim, “l'alimentation forcée n'est jamais moralement acceptable”.
Le SPI et ses unités spéciales continuent à prendre des mesures punitives extrêmes à l'encontre des grévistes de la faim en cherchant à briser leur grève. Celles-ci comprennent l'interdiction de toute communication avec le monde extérieur, des restrictions aux contacts avec leur conseil juridique, le transfert continuel des grévistes de la faim entre les prisons, l'isolement, la mise en isolement cellulaire des leaders des grévistes de la faim, le refus des visites familiales et des amendes (jusqu'à475NIS = 100€).
Les grévistes de la faim sont détenus dans des sections et des cellules vides ; leurs vêtements et leurs biens personnels ont été confisqués et ils sont autorisés à ne garder que des tasses pour boire de l'eau. Dans certaines prisons ils sont obligés de boire de l'eau sale au robinet ou de marcher sur 40 mètres pour avoir de l'eau.
Les gardiens de prison et les unités spéciales du SPI battent et insultent les grévistes de la faim de façon quotidienne, les forçant à rester debout pour un appel sans tenir compte de leur état de santé et de leur incapacitéà se lever.
En plus, les médecins et les infirmiers du SPI continuent à traiter les grévistes de la faim de façon inhumaine ce qui est une violation de l'éthique professionnelle énoncée dans les deux Déclarations de Tokyo et de Malte. Ces violations comprennent le fait de donner du sel et de l'eau aux grévistes de la faim dans des récipients destinés à recueillir des prélèvements d'urine et le retard pris par les unités spéciales du SPI pour conduire les grévistes de la faim aux toilettes. De nombreux grévistes de la faim qui ont été transférés dans des hôpitaux civils et qui sont enchaînés à leur lit d'hôpital 24 heures sur 24, ont demandéàêtre ramenés en prison, au lieu de rester dans ces hôpitaux civils. Il y a actuellement environ 80 grévistes de la faim qui demeurent dans des hôpitaux civils.
Selon les témoignages donnés aux avocats d'Addameer les grévistes de la faim ont déjà perdu de 13à20 kilogrammes et le nombre de ceux qui ont des évanouissements augmente rapidement. En raison de la détérioration de leur état de santé certains des grévistes de la faim souffrent d'hémorragies intestinales et vomissent aussi du sang.
La majorité des grévistes de la faim ont continuéà boycotter les infirmeries des prisons et ont refusé de prendre des vitamines ou des compléments ce qui a entraîné le transfert de 80 grévistes vers des hôpitaux et des centres médicaux : Centre Médical Meir, Hôpital Ichilov, Centre Médical Kaplan, Centre Médical Barzilai, Hôpital Tel HaShomer, Hôpital Beilinson, Hôpital Afouleh, Centre Médical Soroka, Centre Médical Wolfson.
En réponse aux grèves de la faim en cours, les Forces d'Occupation Israéliennes (FOI) continuent à commettre des crimes contre les prisonniers et les détenus palestiniens, tout comme contre ceux qui les soutiennent ou contre quiconque est solidaire de leur cause. Par exemple, le 15 mai 2014, deux jeunes hommes palestiniens non-armés ont été abattus par les FOI au cours d'une manifestation pacifique de soutien aux grévistes de la faim à l'extérieur de la prison d'Ofer.
Addameer exhorte l'Organisation de Libération de la Palestine et le nouveau gouvernement palestinien à :
mettre en œuvre une stratégie juridique nationale fondée sur le Droit Humanitaire International et sur le Droit International des Droits de l'Homme afin de protéger et de garantir les droits des prisonniers et de tenir la Puissance Occupante pour responsable des crimes perpétrés actuellement à l'encontre de tous les prisonniers et détenus palestiniens ;
appeler les Parties Contractantes à la Quatrième Convention de Genève à tenir une réunion pour examiner les violations continuelles par la Puissance Occupante des droits des prisonniers et détenus palestiniens fondés sur l'article 1 de la Quatrième convention de Genève qui oblige les Parties Contractantes à respecter et à garantir l'application des Conventions de Genève en toutes circonstances ;
demander au Conseil de Sécuritéà se réunir immédiatement pour discuter de la question des détenus administratifs palestiniens en grève de la faim et à intervenir pour les protéger ;
solliciter un avis consultatif de la Cour Internationale de Justice sur la légalité de l'Occupation Israélienne et de son contrôle de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza fondés sur plus de 1700 Ordres Militaires israéliens ;
Addameer demande au nouveau Gouvernement palestinien de donner suite à ses promesses de donner la priorité aux prisonniers et de mobiliser toutes ses ressources, à la fois localement et internationalement, en actions réelles et efficaces du Ministère de la Justice et du Ministère des Affaires Étrangères afin de mettre en évidence les abus et les crimes de la Puissance Occupante. En plus Addameer les exhorte aussi à ce qu'ils s'engagent à activer et à soutenir le mouvement de Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) comme moyen de tenir la Puissance Occupante à devoir rendre des comptes pour ses violations en cours à l'encontre des Palestiniens.
Addameer exhorte le Comité International de la Croix Rouge à :
constituer immédiatement une équipe médicale pour suivre l'état de santé des grévistes de la faim ;
condamner publiquement l'usage par Israël de la détention administrative qui est une violation de la Quatrième Convention de Genève ;
faire pression sur le Service des Prisons Israélien pour qu'il respecte les droits des grévistes de la faim afin de garantir leur bien-être.
Addameer exhorte les Nations Unies à :
condamner publiquement l'usage par Israël de la détention administrative qui contrevient à la Quatrième Convention de Genève et au droit international qui garantit les normes de jugement équitable ;
Addameer exhorte l'ONUà créer un comité destinéà mener une enquête internationale qui visitera les prisons et observera le traitement et la situation des prisonniers et détenus palestiniens dans les prisons israéliennes ;
Addameer exhorte l'Organisation Mondiale de la santéà entreprendre une enquête immédiate sur les pratiques et les abus des médecins pénitentiaires en se référant aux Déclarations de Malte et de Tokyo sur les grévistes de la faim.
Addameer exhorte l'Union Européenne à :
mettre un terme à sa politique de deux poids, deux mesures et à commencer à condamner les crimes de guerre israéliens et les crimes contre l'humanitéà l'encontre des civils palestiniens. Addameer exhorte aussi la Haute Représentante de l'Union pour les Affaires Étrangères et la Politique de Sécurité, Catherine Ashton, à faire état publiquement de son inquiétude quant à la vie des grévistes de la faim et à l'usage ininterrompu par Israël de la détention administrative et à mettre l'accent sur la nécessité de protéger les droits des grévistes de la faim en accord avec le Droit Humanitaire International et le Droit International des Droits de l'Homme ;
condamner publiquement l'usage par la Puissance Occupante de la détention administrative à l'encontre des civils palestiniens en violation des Conventions de Genève et des autres lois et règlements internationaux qui n'autorisent l'usage de la détention administrative que sur une base individuelle au cas par cas et dans des cas graves de menace sur la sécurité et qui garantissent les normes d'un procès équitable.
(traduit de l'anglais par Yves Jardin)