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Comment l'Union européenne renforce les colonies israéliennes

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Nous avons assisté, durant cette der­nière décennie, à une capi­tu­lation de l'Union euro­péenne (UE) — et aussi de la France — devant la poli­tique israé­lienne de colo­ni­sation et d'annexion de facto. Le temps est loin, où l'Europe ouvrait une voie cou­ra­geuse en se pro­nonçant pour le droit à l'autodétermination des Pales­ti­niens et pour l'ouverture de négo­cia­tions avec l'Organisation de libé­ration de la Palestine (OLP), une orga­ni­sation que les Etats-​​Unis et Israël défi­nis­saient à l'époque comme « ter­ro­riste ». C'était en juin 1980, à Venise.

Depuis les années 1990, toute idée de rôle autonome de l'UE ou de la France à l'égard des Etats-​​Unis et d'Israël a disparu. Bien sûr, for­mel­lement, elles se pro­noncent en faveur de la création d'un Etat pales­tinien dans les fron­tières de 1967, mais elles refusent de recon­naître que si cet Etat n'existe pas, Israël en porte la res­pon­sa­bilité. Et, malgré la poli­tique de colo­ni­sation et les condam­na­tions rituelles qui s'ensuivent, l'Union ren­force jour après jour ses rela­tions avec le gou­ver­nement israélien sur tous les plans — écono­mique, poli­tique, sécu­ri­taire, mili­taire, etc. La visite du premier ministre israélien à Paris le 31 octobre confortera encore cette relation entre Tel Aviv et Paris. (ajout 31 octobre : A l'occasion de la visite, Hol­lande a demandé la reprise des négo­cia­tions israélo-​​palestiniens sans condi­tions, ce qui veut dire que la France soutien la position israé­lienne de continuer les négo­cia­tions malgré la colonisation)

Le rapport que publient le 30 octobre une dizaine d'associations, intitulé La paix au rabais : comment l'Union euro­péenne ren­force les colonies israé­liennes (PDF), est signi­fi­catif et inquiétant. Dans son avant-​​propos, Hans van der Broek, ancien com­mis­saire européen aux rela­tions exté­rieures, note :

« Au cours des der­nières décennies, l'UE a cri­tiqué et condamné sans relâche la poli­tique de colo­ni­sation. Des dizaines de décla­ra­tions et autres posi­tions offi­cielles de l'UE réaf­firment l'illégalité des colonies au regard du droit inter­na­tional et consi­dèrent que celles-​​ci repré­sentent un obs­tacle majeur à la paix. L'UE a sou­ligné à maintes reprises qu'elle ne recon­naî­trait aucune modi­fi­cation uni­la­térale apportée aux fron­tières d'avant 1967, y compris concernant Jéru­salem. Cependant, alors que la construction des colonies se poursuit et s'accélère, nous, Euro­péens, nous gardons de passer des paroles aux actes. À ce jour, nous nous sommes abs­tenus d'exploiter notre important effet de levier poli­tique et écono­mique vis-​​à-​​vis d'Israël pour juguler sur le terrain les déve­lop­pe­ments qui vont à l'encontre de nos valeurs fon­da­men­tales et portent atteinte à nos intérêts stratégiques. »

C'est le cha­pitre 3 de ce texte concernant les rela­tions de l'Europe avec les colonies qui est le plus acca­blant. Il montre comment l'Union viole, sans aucun état d'âme, et le droit inter­na­tional et ses propres décla­ra­tions politiques.

« Il est dif­ficile de déter­miner le volume exact des expor­ta­tions en pro­ve­nance des colonies vers l'UE étant donné que l'UE ne recueille pas de données dis­tinctes pour les colonies. Le ministre israélien des Affaires étran­gères a tou­tefois fait savoir à la Banque mon­diale il y a peu que les expor­ta­tions des colonies vers l'UE se mon­taient à 300 mil­lions de dollars par an (230 mil­lions d'euros). Cela repré­sente environ 2 % de la totalité des expor­ta­tions israé­liennes vers l'UE. (…) Il est pro­bable que si la valeur des expor­ta­tions des colonies vers l'Europe devait également inclure les pro­duits entiè­rement ou par­tiel­lement pro­duits ou emballés dans les colonies, ce chiffre serait consi­dé­ra­blement plus élevé. » Le texte rap­pelle que les expor­ta­tions de pro­duits pales­ti­niens vers l'Union se montent seulement à 15 mil­lions d'euros.

Après avoir énuméré les pro­duits agri­coles importés, le texte évoque les prin­cipaux pro­duits manu­fac­turés achetés en Europe (notez bien les noms pour vos pro­chains achats) : les cos­mé­tiques Ahava, les machines à gazéifier SodaS­tearn, les plas­tiques Keter, etc.

Plus grave, l'implication de sociétés euro­péennes dans les ter­ri­toires occupés :

« Au-​​delà du com­merce de mar­chan­dises issues des colonies, cer­taines sociétés inter­na­tio­nales opèrent dans les colonies, notamment en four­nissant des ser­vices et un soutien aux infra­struc­tures connexes. Parmi ces acti­vités figurent la construction d'infrastructures de transport, la pres­tation de ser­vices de transport aux colonies, la livraison d'équipements pour les postes de contrôle, la pres­tation de ser­vices de sécurité aux entre­prises des colonies, l'extraction de res­sources non renou­ve­lables et des inves­tis­se­ments dans les usines des colonies. Vous trou­verez ci-​​après plu­sieurs exemples clés qui s'appuient sur des infor­ma­tions récentes émanant de dif­fé­rentes sources » : Alstom, Veolia, G4S, Uni­lever, Deutsche Bahn, etc.

La cin­quième partie du rapport se termine en listant les mesures que pourrait prendre l'Union euro­péenne pour faire cesser ces actions illégales :

Veiller à l'étiquetage correct de tous les pro­duits issus des colonies à l'attention des consom­ma­teurs. Dis­suader les entre­prises de mener des acti­vités com­mer­ciales et d'investir dans les colonies. Interdire les impor­ta­tions de pro­duits issus des colonies. Veiller à ce que les pro­duits issus des colonies ne béné­fi­cient pas d'un accès pré­fé­rentiel aux marchés. Exclure les colonies des accords bila­téraux et des ins­tru­ments de coopé­ration. Exclure des marchés publics les pro­duits des colonies et les entre­prises qui y sont implantées. Retirer les orga­ni­sa­tions qui financent les colonies des régimes de déduction fiscale. Empêcher les tran­sac­tions finan­cières qui sou­tiennent les colonies et les acti­vités connexes. Dis­suader les citoyens d'acheter des biens immo­bi­liers dans les colonies. Émettre des direc­tives à l'attention des voya­gistes euro­péens. Dresser une liste des entre­prises qui font une décla­ration erronée sur l'origine des mar­chan­dises issues des colonies Insister pour qu'Israël désa­grège les données rela­tives aux colonies pour les besoins de l'OCDE (Orga­ni­sation de coopé­ration et de déve­lop­pement économiques).

En décembre 2008, à la veille de l'agression contre Gaza, l'Union euro­péenne rehaussait ses rela­tions avec Israël, donnant ainsi un feu vert à l'action mili­taire israé­lienne (« L'Union euro­péenne capitule devant Israël », 10 décembre 2008). Quelques mois plus tard, elle pré­tendit qu'elle gelait ce rap­pro­chement, ce qui relevait du men­songe, aucune mesure réelle n'étant prise pour stopper les dif­fé­rents accords avec Israël, dont le dernier exemple concerne le pro­tocole ACAA (relatif à l'évaluation de la conformité et l'acceptation des pro­duits indus­triels UE-​​​​Israël), qui a été ratifié par le Par­lement européen, le 23 octobre, par 379 voix pour, 230 contre et 41 abs­ten­tions. Cet accord, comme le sou­ligne Véro­nique de Keyser, vice-​​présidente du groupe socia­liste au Par­lement européen, repré­sente une accep­tation de facto du rehaus­sement des rela­tions israélo-​​européennes.

Bien sûr, l'Union euro­péenne continue de financer l'Autorité pales­ti­nienne. Mais les sommes versées servent notamment à payer les fonc­tion­naires et à combler le déficit bud­gé­taire, ce qui, avant 1993, était financé par Israël. L'Union a ainsi allégé le fardeau israélien, alors même que l'occupation se poursuit. Quant aux infra­struc­tures construites par ses soins en Cis­jor­danie et à Gaza, elles sont régu­liè­rement détruites par l'armée israélienne…

Publié par Blog du Diplo


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