Les Palestiniens devraient acquérir jeudi une nouvelle stature internationale en accédant au rang d'Etat observateur non-membre à l'ONU. Mais dans les faits, cela change quoi ?
La Palestine s'apprête à passer du rang de simple "entité observatrice"à celui d'"État observateur" aux Nations-Unies. Soixante-cinq ans jour pour jour après l'adoption par l'ONU en 1947 du plan de partage de la Palestine mandataire, qui prévoyait un État juif et un État arabe. Une victoire symbolique donc. Mais dans les faits, quels bénéfices réels seront apportés par ce changement pour les Palestiniens ?
"Tout et rien", résume pour Métro le président de l'Association France Palestine Solidarité, Jean-Claude Lefort. "Sur le terrain, il ne faut pas se faire d'illusions, la situation de la population ne va pas évoluer", souligne-t-il. "De l'autre côté, le vote de l'ONU est un signe extrêmement encourageant dans la mesure où on va pour la première fois parler d'État. Non membre, certes, mais un État quand même". Lors de l'adoption du plan de partage de la Palestine en 1947, il était en effet prévu que soient proclamés deux États. Un État juif et un État arabe. Le second n'a jamais vu le jour.
"Un verrou qui saute"
Accorder aux Palestiniens le statut d'État observateur non-membre ne constitue pas la reconnaissance d'un État à part entière, avec tous les droits s'y rattachant. Mais "c'est un premier verrou qui saute, un pas supplémentaire dans la reconnaissance d'un véritable État palestinien, souligne pour Metro Didier Billon, chercheur à l'Institut des Relations Internationales et Stratégies (IRIS) et spécialiste du Proche-Orient. Les autorités palestiniennes vont désormais pouvoir participer à toutes les instances de l'ONU comme l'Organisation mondiale de la santé et le Programme alimentaire mondial".
Surtout, le changement de statut de la Palestine pourrait bien changer la donne avec Israël. "On ne parlera plus de territoires occupés mais d'un État occupé par un autre", souligne Jean-Claude Lefort. "C'est très important au regard du droit international. L'ONU devra traiter du problème israélo-palestinien en prenant en compte ce nouveau paramètre : il y a deux États là-bas, et non plus un seul".
Un symbole avant tout
Les Palestiniens vont également pouvoir saisir, et pour la première fois, les instances juridiques internationales de l'ONU, telle que la Cour pénale internationale (CPI). Et donc déposer plainte contre l'État hébreu. C'est précisément sur ce point que se crispe la communauté internationale. Londres et Washington ont fait pression jusqu'au bout sur les autorités palestiniennes pour qu'elles renoncent au droit de recourir aux juridictions internationales. En vain. "Pour autant, je ne suis pas sûr qu'Israël puisse craindre quelque chose, souligne le chercheur. D'abord parce que ces démarches prennent énormément de temps, ensuite parce que l'Etat hébreu se dédouane très souvent des contraintes du droit international".
Quoi qu'il en soit, le symbole est fort, et "va peser dans les négociations", pour l'association France-Palestine Solidarités. Il va permette de relancer un processus de paix qui s'enlise depuis des décennies et donc des discussions directes entre Palestiniens et Israéliens. Tout l'enjeu réside, pour Jean-Claude Lefort, dans le nombre de pays, sur les 193État membres, qui soutiendront la résolution ce jeudi soir. "On va pouvoir peser le rapport de force derrière la cause palestinienne, voir combien d'États soutiennent leur droit à la reconnaissance".