Chronique d'une victoire électorale annoncée ? A plus de six semaines du scrutin parlementaire du 22 janvier 2013, et compte tenu des surprises stratégiques possibles dans un contexte régional instable, la prudence incite à ne pas faire trop de prévisions, mais le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, avait toutes les raisons d'être satisfait, vendredi 7 décembre.
D'abord par les résultats du dernier sondage, publié par le quotidien Maariv : la coalition Likoud-Israel Beitenou (" Israël, notre maison "), qui associe le parti de M. Nétanyahou et la formation ultranationaliste de son ministre des affaires étrangères, Avigdor Lieberman, obtiendrait 38 sièges sur les 120 que compte la Knesset, le Parlement israélien, loin devant le Parti travailliste (crédité de 19 sièges), ce qui place a priori le premier ministre en position de se succéder à lui-même.
Mais la meilleure nouvelle pour M. Nétanyahou a été apportée jeudi soir, avec la clôture officielle des listes électorales. L'incapacité des formations du centre à s'unir, afin de présenter une alternative crédible, a en effet été confirmée. Nul doute que M. Nétanyahou va exploiter cet émiettement, qui se manifeste par des relations très acrimonieuses entre dirigeants de l'opposition.
Ego très développés
Ceux-ci avaient pourtant compris le danger : ces dernières semaines, Tzipi Livni, ancienne présidente du parti de centre droit Kadima, Shelly Yacimovich, chef du Parti travailliste, Shaul Mofaz, actuel président de Kadima, Yair Lapid, l'ex-journaliste qui a créé le parti Yesh Atid, et Zehava Gal-On, du parti Meretz (socialiste), ont rivalisé d'appels à l'unité pour " faire barrage "à Benyamin Nétanyahou. L'appétit de pouvoir et des ego très développés dans chaque formation en ont décidé autrement.
La bataille a donc fait rage jusqu'au dernier moment, avec la décision d'Amir Peretz, numéro trois de la liste Labour, de rejoindre le Mouvement, le nouveau parti créé par Mme Livni. Pour l'ancienne ministre des affaires étrangères, la recrue est de taille : ex-président du Parti travailliste, ancien ministre de la défense, ancien chef de la centrale syndicale Histadrout, Amir Peretz est un séfarade, une qualité bien venue pour la très ashkénaze Tzipi Livni.
Il apporte à Mme Livni (qui s'intéresse surtout à la politique étrangère) une caution sociale qui lui fait défaut, mais qui risque d'être encombrante, tant leurs positions semblent éloignées.
M. Peretz a quitté le Parti travailliste en raison de sa mésentente avec Mme Yacimovich, qui portait notamment sur le refus obstiné de l'intéressée de s'exprimer sur tout autre question que sociale, et en particulier le processus de paix israélo-palestinien.
Cela tombe bien : M. Nétanyahou fait en sorte que le scrutin - comme c'est, historiquement, le cas en Israël - se joue exclusivement sur les enjeux de sécurité et, en particulier, la dernière confrontation armée avec le Hamas, à Gaza ; l'épreuve de force politique avec l'Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas ; la perspective de frappes militaires contre les sites nucléaires de l'Iran ; les menaces représentées par le Hezbollah libanais et la Syrie, la déstabilisation croissante de l'Egypte…
Le ciel électoral de Benyamin Nétanyahou est d'autant plus dégagé que le seul homme politique qui aurait pu lui faire de l'ombre, Ehoud Olmert, ancien premier ministre et ex-président de Kadima, a apparemment décidé de jeter l'éponge : son avenir à court terme obéré par la menace de poursuites judiciaires, M. Olmert ne jouera pas le rôle de fédérateur des centres.
La justice israélienne semble être favorable aux intérêts du premier ministre, puisqu'elle ne fera preuve d'aucune célérité pour engager des poursuites judiciaires contre Avigdor Lieberman, sur lequel pèsent de lourds soupçons de corruption. Enfin, dernier rebondissement, ces deux derniers jours, ni Tzipi Livni ni Shelly Yacimovich n'ont exclu de rejoindre, après le scrutin, une coalition gouvernementale que dirigerait… Benyamin Nétanyahou.
La majorité en position de force dans les intentions de vote
La coalition de droite au-delà des 61 sièges nécessaires Le sondage du quotidien Maariv, publié le vendredi 7 décembre, attribue 38 sièges à la coalition Likoud-Israel Beitenou, 13 au Shass (ultraorthodoxes séfarades), 12à la coalition d'extrême droite HaBayit HaYehoudi, et 6 au Parti unifié de la Torah (ultraorthodoxe ashkénaze).
La gauche et le centre distancés Le Parti travailliste obtiendrait, toujours selon le Maariv, 19 sièges, et le parti de Tzipi Livni, Mouvement, 10. La toute nouvelle formation de l'ancien journaliste Yaïr Lapid, en chute libre, n'obtiendrait que 5 sièges. Le Meretz, le parti historique de la gauche, et le parti centriste Kadima n'auraient aucun élu.