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Entretien avec Rony Brauman : extraits

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Figure de l'action huma­ni­taire, Rony Brauman a notamment dirigé Médecins sans fron­tières France, où il est tou­jours actif. Néà Jéru­salem en 1950, il reven­dique sa citoyenneté israé­lienne mais dit ne pas en avoir la natio­nalité. L'État hébreu dis­socie en effet les deux notions, la seconde établissant des dis­tinc­tions com­mu­nau­taires. « Je ne suis pas retourné en Israël depuis que le gou­ver­nement m'oblige à y entrer avec un pas­seport israélien, dit-​​il. Avec un tel document, je ne peux pas aller dans les ter­ri­toires occupés. Et je refuse de me rendre en Israël si je ne peux pas me rendre dans les Ter­ri­toires. » Auteur de plu­sieurs essais, il s'est dis­tingué par ses mises en garde sur les dangers du devoir d'ingérence. Une position qui l'a entraîné dans un véri­table duel d'intellectuels avec le phi­lo­sophe français Bernard-​​Henri Lévy sur la question libyenne en 2011.

Jeune Afrique : Comment réagissez-​​vous à l'octroi à la Palestine du statut d'État obser­vateur à l'ONU ?

Rony Brauman : C'est une bonne nou­velle. Cela mettra les Israé­liens face à leur statut d'occupant d'un pays reconnu et non plus de « ter­ri­toires dis­putés », comme ils aiment à le dire. Cela per­mettra aux Pales­ti­niens de sortir du face-​​à-​​face stérile dans lequel ils sont enfermés et de faire valoir leurs reven­di­ca­tions à l'ONU, où ils comptent de nom­breux sou­tiens. Il faut mani­fes­tement cesser de compter sur Washington, clai­rement du côté israélien, pour jouer l'arbitre. La recon­nais­sance de la Palestine, bien qu'incomplète, va dans ce sens.

Le cessez-​​le-​​feu à Gaza conclu entre le Hamas et Israël, c'est l'échec de la poli­tique de négo­ciation pacifique ?

C'est en effet un échec pour la poli­tique du Fatah et de l'Autorité pales­ti­nienne (AP), qui ont renoncéà la lutte armée et n'ont obtenu en échange que l'expansion continue des colonies. La poli­tique israé­lienne a tou­jours été de mar­gi­na­liser les natio­na­listes pro­gres­sistes pour chercher un face-​​à-​​face avec les isla­mistes. Par des moyens mili­taires, poli­tiques, écono­miques, les Israé­liens ont lit­té­ra­lement piétiné l'AP afin d'ancrer l'idée qu'ils n'avaient pas de par­te­naire de paix. C'est l'un de leurs grands slogans : nous voulons la paix, mais il faut être deux pour cela. Tel-​​Aviv a pour stra­tégie de décréter quels sont ses inter­lo­cu­teurs légi­times. Consi­dérant d'un côté le Hamas comme une orga­ni­sation ter­ro­riste, de l'autre l'AP comme un fantôme sans légi­timité, il les invalide tous les deux et ferme la porte aux négociations.

L'Occident considère aussi le Hamas comme un mouvement terroriste…

C'est insensé, même si je ne crois pas à une issue mili­taire au conflit : l'intifada a été un désastre et de très nom­breux Pales­ti­niens le recon­naissent. Cela étant, une popu­lation occupée a le droit de se défendre. La légitime défense est une notion indis­cu­table, ins­crite dans tous les textes, pré­sente dans toutes les têtes et à laquelle on ne peut s'opposer. Uti­liser la vio­lence contre les Israé­liens est une erreur poli­tique et stra­té­gique - compte tenu du rapport des forces com­plè­tement dés­équi­libré en faveur d'Israël et de ses consé­quences humaines ter­ribles -, mais consi­dérer le Hamas comme ter­ro­riste parce qu'il se défend en est une autre. D'autant qu'il a clai­rement indiquéà plu­sieurs reprises qu'il acceptait l'existence d'Israël dans les fron­tières de 1967. Le Hamas doit être l'un des inter­lo­cu­teurs des Israéliens.

Que reste-​​t-​​il du camp de la paix en Israël ?

Il y a tou­jours un camp de la paix composé de gens plus modérés que ceux au pouvoir. Ils béné­fi­cient d'un soutien mesuré. Le Meretz, qui prône la solution des deux États séparés, n'a recueilli que 2,5 % des sièges aux légis­la­tives de 2009. Il y a aussi à l'extrême gauche ceux qui pro­posent la création d'une confé­dé­ration israélo-​​palestinienne : la solution de l'État unique, bina­tional. Spon­ta­nément, je suis porté vers cette forme de confé­dé­ration, qui offi­cia­li­serait un état de fait, avec bien sûr une égalité des droits civiques, poli­tiques, sociaux pour l'ensemble de la popu­lation. Hélas, l'heure globale est aux rétré­cis­se­ments iden­ti­taires. De facto, c'est un État bina­tional qui se construit, mais sous les pires aus­pices avec la mise en place d'une situation d'apartheid.

Peut-​​on espérer des progrès du second mandat d'Obama ?

Rien n'a été fait pendant le premier… Espérer, on peut tou­jours le faire et on y est un peu forcé, les Amé­ri­cains étant les seuls à avoir une influence sur les Israé­liens. Hélas, en dépit de l'antipathie à peine cachée d'Obama pour Neta­nyahou, le soutien à l'État hébreu n'a jamais été aussi fort et conforte le Premier ministre ­israélien dans son intran­si­geance. Et l'opinion inter­na­tionale est tel­lement braquée contre Israël que les États-​​Unis restent ses seuls amis et pro­tec­teurs. Il est très imprudent pour Israël de faire reposer son exis­tence et sa sécurité sur un unique allié, alors que beaucoup de signes montrent que même aux États-​​Unis la solidité de cette alliance est en train de s'effriter, y compris parmi les Juifs amé­ri­cains, de plus en plus éloignés de cet État violent et sectaire.

[…]

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Publié par Jeune Afrique


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