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Pour qui voter ?

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Les élec­tions auront lieu dans trois jours, et elles sont ennuyeuses, ennuyeuses, ennuyeuses.

Ces élec­tions sont tel­lement ennuyeuses que même penser à leur ennuyeuseté (si un tel mot existait) est ennuyeux

Du fait de l'absence de tout débat sur les enjeux, les experts des médias sont réduits à dis­cuter des émis­sions élec­to­rales. Cer­taines sont bonnes, cer­taines indif­fé­rentes, cer­taines atroces. Comme s'il s'agissait d'un concours entre conseillers en com­mu­ni­cation, rédac­teurs, “stra­tèges” et autres, le public étant simple spectateur.

PARTOUT où je ren­contre des gens, on me dit avec une réelle inquiétude. “Je ne sais pas pour qui voter ! Il n'y a aucun parti qui me convienne vraiment !” et ensuite vient la question que je redoute : “Pour qui me conseillez-​​vous de voter ?”

J'ai suivi de près toutes les 18élec­tions passées de la Knesset, sauf la pre­mière quand j'étais encore soldat. Dans plu­sieurs d'entre elles, je fus moi-​​même can­didat. J'ai tou­jours écrit sur mes pré­fé­rences, mais je n'ai jamais dit à mes lec­teurs comment voter.

Je suivrai la même règle aujourdhui.

ENPREMIERLIEU, voter est un impératif absolu, plus que jamais.

Ce n'est pas parce que c'est la “fête de la démo­cratie”, un “devoir civique”, et bla-​​bla-​​bla. Cette fois-​​ci, c'est une nécessité vitale.

Une abs­tention est un vote pur et simple pour Ben­jamin Neta­nyahou et ses alliés. Comme il apparaît main­tenant, plus de la moitié des membres de la 19e Knesset appar­tien­dront à l'extrême droite et au-​​delà, au moins une dou­zaine d'entre eux étant car­rément fascistes.

Ne pas voter signifie les renforcer encore plus.

C'est par­ti­cu­liè­rement vrai pour les citoyens arabes. Les son­dages pré­voient que presque la moitié d'entre eux ne voteront pas du tout. Les raisons sont nom­breuses : pro­tes­tation générale contre l'Etat “juif”, pro­tes­tation contre les dis­cri­ma­tions, perte d'espoir d'un quel­conque chan­gement positif, désap­pro­bation des partis “arabes”, etc. Toutes bonnes raisons.

Mais l'abstention veut dire pour les citoyens arabes se tirer une balle dans le pied. Si leur situation est mau­vaise main­tenant, elle peut encore devenir bien bien pire. Le Cour suprême qui géné­ra­lement les protège, s'est repliée dans l'impuissance. Les lois dis­cri­mi­na­toires prolifèrent.

Cer­tains de l'extrême droite veulent les priver de tout droit de vote. Pourquoi aller volon­tai­rement dans leur sens ?

VENONS-​​EN au choix concret.

Ma méthode consiste àécrire toutes les listes élec­to­rales concur­rentes dans un ordre aléatoire.

Ensuite je raye toutes celles pour les­quelles je ne voterai à aucun prix. Cest le plus facile.

D'abord il y a le Likoud-​​Beitenou. Le Likoud seul était suf­fi­samment mauvais. L'adjonction de l'Israel Bei­tenou d'Avigdor Liberman le rend encore plus destructeur.

Je suis d'accord avec Barack Obama que Néta­nyahou nous conduit à un désastre certain. Son rejet total de la paix, l'obsession de la colo­ni­sation, le ren­for­cement de l'occupation, tout cela trans­forme inexo­ra­blement Israël ( Israël même, pas seulement les ter­ri­toires occupés) en un Etat d'apartheid. Déjà dans l'actuelle Knesset, des lois anti-​​démocratiques abo­mi­nables ont été votées. Main­tenant que le Likoud a été purgé de tous ses membres modérés, ce pro­cessus sera accéléré.

Liberman et ses aco­lytes rejoi­gnant le Likoud, les choses sont encore plus dan­ge­reuses. Néta­nyahou devra se posi­tionner et agir de façon plus extré­miste, de peur de perdre le lea­dership face à Liberman qui est le numéro 2. Il est fort pro­bable que Liberman réussira à le rem­placer quelque part le long de la route.

L'émergence de Naftali Bennet comme star des élec­tions rend les choses encore plus deses­pérées. Il semble y avoir une règle sur la droite israé­lienne selon laquelle per­sonne n'est tel­lement extrê­miste qu'on ne puisse en trouver un autre encore plus extrêmiste.

LEGROUPE suivant àêtre rayé de la liste est le groupe reli­gieux. Il com­prend prin­ci­pa­lement deux partis : Le parti “Juifs de la Torah” askhénaze et le parti Shas séfarade.

Tous deux étaient aupa­ravant assez modérés dans les ques­tions de paix et de guerre. Mais ces temps sont révolus. Des géné­ra­tions d'ethnocentrisme étroit, d'éducation reli­gieuse ont engendré une direction de droite natio­na­liste fana­tique. Bennett, aussi, fut élevé dans ce camp.

Comme si cela ne suf­fisait pas, ces partis veulent nous imposer la Halacha juive, tout comme leurs homo­logues musulmans veulent imposer la charia. Ils s'opposent presque auto­ma­ti­quement à toutes les idées pro­gres­sistes, comme une consti­tution écrite, la sépa­ration de la syna­gogue et de l'Etat, le mariage civil, le mariage entre per­sonnes du même sexe, l'avortement et que sais-​​je encore. Rayés de la liste.

D'UNAUTREORDRE sont les partis soi-​​disant du “Centre”

Le plus important est le parti tra­vailliste de Shelly Yachi­movich, qui reste aujourd'hui autour de 15%.

Je dois avouer que je n'ai jamais beaucoup aimé Shelly, mais cela ne devrait pas influencer mon vote. Elle peut (et le fait) se vanter de plu­sieurs succès. Elle a pris un parti moribond et l'a trans­formé de nouveau en une force vive. Elle a trouvé des can­didats nou­veaux et séduisants.

L'ennui est qu'elle a aidéàéradiquer la paix de l'agenda national. Elle a fait des ouver­tures aux colons et à leurs alliés. Même si elle a mani­festé un intérêt de pure forme pour la “solution des deux-​​Etats”, elle n'a abso­lument rien fait pour la favo­riser. Son seul souci est ce qu'elle appelle la “justice sociale”.

Elle a promis de ne pas par­ti­ciper a un gou­ver­nement Nétanyahou-​​Liberman. L'expérience nous a appris à ne pas prendre trop au sérieux de telles pro­messes pré-​​électorales – il y a tou­jours une “urgence nationale” tapie dans un coin – mais même comme chef de l'opposition, une paix au rabais peut faire beaucoup de dégâts. Désolé, pas pour moi.

La prin­cipale concur­rente de Shelly est Tzipi. Face à ces orien­ta­tions, Livni est tout l'opposé. Son prin­cipal et presque seul argument élec­toral est la reprise de négo­cia­tions avec Mahmoud Abbas.

Très bien. Mais Tzipi et son ancien patron Ehoud Olmert ont été au pouvoir pendant presque quatre ans, durant les­quels ils ont lancé deux guerres (Liban II et Plomb durci) et ne sont pas par­venus à même s'approcher de la paix. Pourquoi la croire aujourd'hui ?

Je n'ai jamais entendu Tzipi pro­noncer un seul mot de sym­pathie ou de com­passion pour le peuple pales­tinien. Je la soup­çonne de ne s'intéresser vraiment qu'à un pro­cessus de paix sans fin, pas à la paix elle-​​même.

UNPERSONNAGE intéressant dans ces élections est Yair Lapid.

Que représente-​​t-​​il ? Eh bien, il paraît très bien. Ex-​​personnalité de la télé­vision, il est bon à la TV, le seul terrain de bataille de ces élec­tions. Son pro­gramme cor­respond à l'américaine “maternité et tarte aux pommes”.

Il me rap­pelle Groucho Marx : “Voilà mes prin­cipes. Si vous ne les aimez pas, j'en ai aussi d'autres.”

Pour moi il est “le petit Lapid” comparéà son défunt père, “Tommy” Lapid, qui passa aussi passé de la télé­vision à la poli­tique. Lapid père était un per­sonnage beaucoup plus com­pliqué : très aimable dans le contact per­sonnel, très offensif à la télé­vision, d'extrême droite dans les affaires natio­nales et ennemi juré du camp reli­gieux. Son fils se contente de plaider : votez pour moi parce que je suis un chic type.

Il ne fait pas mystère de son désir de devenir ministre sous Néta­nyahou. Désolé, pas pour moi.

ÀPART les listes natio­nales arabes, qui ne sont pas inté­ressées par les votes juifs, et celles qui ne peuvent pas s'attendre à passer la barre des 2%, il ne reste que deux can­didats sur la liste : Hadash et Meretz.

Tous deux sont proches de ce à quoi je crois : ils sont acti­vement engagés dans la lutte pour la paix avec le peuple pales­tinien et pour la justice sociale.

Comment choisir ?

Hadash est fon­da­men­ta­lement le visage public du parti com­mu­niste. Cela me dissuade-​​t-​​il ?

Je n'ai jamais été com­mu­niste, ou même mar­xiste. Je me défi­nirais comme un social-​​démocrate. J'ai beaucoup de sou­venirs concernant le parti com­mu­niste, des positifs, beaucoup de négatifs. Il n'est pas facile pour moi d'oublier son passé sta­linien orthodoxe. Mais là n'est pas la question. Nous ne votons pas pour le passé mais pour l'avenir.

Hadash, à son actif, se définit comme un parti arabo-​​juif – le seul (puisque le parti que j'ai aidéà fonder en 1984 a perdu son dyna­misme au bout de huit ans et a disparu.) Pourtant, pour la grande majorité des Israé­liens c'est un “parti arabe”, puisque 95% de ses élec­teurs sont arabes. Il a un membre de la Knesset juif, le très actif et méritant Dov Hanin. S'il avait dirigé une liste tout seul, il aurait pu attirer beaucoup de jeunes élec­teurs et théo­ri­quement changer le paysage électoral.

DANS L'ENSEMBLE, je préfère Meretz, quoique sans enthousiasme.

Il y a quelque chose de vieux et de morne dans ce parti qui fut fondé en 1973. Il dit toutes les choses justes sur la paix et la justice sociale, la démo­cratie et les droits de l'homme. Mais il les dit d'une voix lasse. Il n'y a pas de nou­velles têtes, pas de nou­velles idées,pas de nou­veaux slogans.

Un grand nombre de grands intel­lec­tuels, écri­vains et artistes sont sortis du Meretz. (Le parti prit grand soin de ne pas se classer à gauche sans claires réfé­rences “sio­nistes”.) Mais, comme un ministre tra­vailliste l'a dit il y a long­temps des intel­lec­tuels : “Ils ne rem­plissent pas à moitié un camp de réfugiés.”

L'un dans l'autre, il est encore le meilleur choix dans les cir­cons­tances actuelles. Une aug­men­tation signi­fi­cative de sa pré­sence à la Knesset encou­ra­gerait au moins les espoirs pour l'avenir.

ET C'EST l'avenir qui compte. Le len­demain de ces élec­tions désas­treuses, l'effort pour créer un paysage dif­férent doit com­mencer. Pour que nous ne soyons plus jamais confrontés à un tel dilemme.

Espérons que la pro­chaine fois – qui peut être très bientôt – nous aurons l'occasion de voter avec enthou­siasme pour un parti dyna­mique qui incarne nos convic­tions et nos espoirs.

Article écrit en hébreu et en anglais, publié sur le site de Gush Shalom le 19 janvier 2013 – Traduit de l'anglais "Who to vote for ?" pour l'AFPS : SW


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