Quantcast
Channel: Association France Palestine Solidarité
Viewing all articles
Browse latest Browse all 26548

Quand Israël attaquera-​​t-​​il l'Iran ? Il y a deux ans…

$
0
0

Interrogé il y a quelques jours pour savoir quand Israël atta­querait l'Iran, Patrick Clawson, cher­cheur au Washington Ins­titute for Near East Policy (Winep), un think-​​tank lié au lobby pro-​​israélien, répondait : « Il y a deux ans » (cité par Scott Shane, « Adver­saries of Iran Said to Be Stepping Up Covert Actions », The New York Times, 11 janvier).

Cette décla­ration venait après le meurtre à Téhéran d'un jeune phy­sicien nucléaire, qui faisait lui-​​même suite à plu­sieurs autres meurtres « mys­té­rieux », dont on s'étonne qu'ils aient été si peu dénoncés par les défen­seurs des droits humains — une pétition circule tou­tefois pour les condamner, « Petition against the Murder of Iranian Scien­tists »). L'Iran a aussi été victime ces der­niers mois de cyber-​​attaques par le virus Stuxnext (lire Phi­lippe Rivière, « Cyber-​​attaque contre Téhéran », Le Monde diplo­ma­tique, mars 2011).

Cette escalade est incon­tes­ta­blement le fait d'Israël, qui ne cherche même pas à démentir. En revanche, il est plus dif­ficile de saisir quelle est la stra­tégie du pré­sident Obama. Au moment même où l'administration amé­ri­caine affirme, haut et fort, sa soli­darité totale avec Israël et sa déter­mi­nation à empêcher l'Iran de se doter de la bombe ato­mique, les manœuvres mili­taires entre Israël et les Etats-​​Unis sont reportées et les expli­ca­tions avancées pour ce report sont loin d'être claires ; Hillary Clinton condamne fer­mement le meurtre du cher­cheur à Téhéran ; les ser­vices de ren­sei­gnement « occi­dentaux » (en fait amé­ri­cains) fai­saient filtrer des infor­ma­tions sur la res­pon­sa­bilité du Mossad dans les meurtres des scien­ti­fiques ira­niens (Karl Vick and Aaron J. Klein, « Who Assas­si­nated an Iranian Nuclear Scientist ? Israel Isn't Telling », Time Magazine, 13 janvier) ; paral­lè­lement, ils divul­guaient des infor­ma­tions sur des agents israé­liens qui tentent de se faire passer pour des membres de la CIA afin de recruter des com­bat­tants sun­nites opposés au régime iranien (Mark Perry, « False flags », Foreign Policy, 13 janvier). Enfin, les Etats-​​Unis ont lancé une sévère mise en garde à Téhéran contre tout blocage du détroit d'Ormuz et mobi­lisent leurs alliés pour arrêter les achats de pétrole iranien.

Comment expliquer ces contra­dic­tions ? Gary Sick, un ancien conseiller du pré­sident Jimmy Carter, avance deux expli­ca­tions pos­sibles : l'incompétence d'un côté ; de l'autre, un rideau de fumée pour pré­parer un nouveau dia­logue avec Téhéran (« Stealth Enga­gement ? », Gary's choices, 16 janvier 2011). Et il penche pour la seconde.

Il relève ainsi les décla­ra­tions de Leon Panetta, le secré­taire amé­ricain à la défense et ancien directeur de la CIA. Le 2 décembre 2011, celui-​​ci dressait un tableau catas­tro­phique des consé­quences d'une guerre contre l'Iran ; quelques jours plus tard, le 19 décembre sur CBS, il affirmait que l'Iran aurait peut-​​être une bombe ato­mique d'ici un an ; enfin le 8 janvier, à la question de savoir si l'Iran voulait la bombe ato­mique, il répondait… non.

Gary Sick met en avant trois fac­teurs expli­catifs à cette appa­rente inco­hé­rence. D'abord, on est en pleine année élec­torale aux Etats-​​Unis, avec un Congrès favo­rable à une escalade des sanc­tions, notamment contre le pétrole iranien — avec le risque qu'elle soit ana­lysée à Téhéran comme « un acte de guerre ». D'autre part, pour le pré­sident Obama, et compte tenu des consé­quences d'un conflit dans le Golfe, il est important de retourner à la table des négo­cia­tions. Enfin, il y a l'extrémisme du gou­ver­nement Neta­nyahou et son influence aux Etats-​​Unis, notamment dans la pers­pective de l'élection pré­si­den­tielle, même si, comme le rap­pelle Sick, il existe des réserves face à une aventure mili­taire — Ron Paul, l'un des can­didats à l'investiture répu­bli­caine, s'est ouver­tement pro­noncé contre.

Dans ces condi­tions, la stra­tégie du pré­sident Obama serait d'ouvrir une voie de com­mu­ni­cation avec Téhéran, tout en accom­pa­gnant les gestes d'ouverture de décla­ra­tions dures à l'encontre du régime iranien. Et il mul­tiplie les pres­sions sur Israël pour que ce pays ne s'engage pas dans une aventure mili­taire. Selon Sick, la visite du pré­sident du Par­lement iranien Ali Larijani à Ankara en janvier et ses décla­ra­tions sur une reprise des négo­cia­tions avec les pays occi­dentaux, s'inscriraient dans le cadre des ten­ta­tives de dia­logue lancées par la Maison Blanche.

Ces ini­tia­tives n'ont pas l'heur de plaire à Nicolas Sarkozy et aux Euro­péens, qui poussent les Etats-​​Unis à adopter des posi­tions plus fermes, au lieu de jouer le rôle de faci­li­tateur et de favo­riser le dia­logue. Et qui ne veulent surtout pas entendre parler d'un Proche-​​Orient débar­rassé des armes nucléaires, ce qui impli­querait qu'Israël renonce à la bombe. C'est pourtant la meilleure solution, comme l'expliquent Shibley Telhami et Steven Kull dans un article du New York Times, le 15 janvier, « Pre­venting a nuclear Iran, peacefully ».

publié le 17 janvier 2012 sur le blog du Monde diplo­ma­tique "Nou­velles d'Orient"

Liens hypertextes sur l'article source

http://blog.mondediplo.net/2012-01-...


Viewing all articles
Browse latest Browse all 26548