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Etranglés éco­no­mi­quement, les 1,7 million d'habitants de Gaza n'ont plus que six heures d'électricité par jour

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Il arrive à Sobhi Redwan, maire de Rafah, de se contredire : par exemple lorsqu'il affirme que "100 % des 1000 tunnels " de contre­bande qui pas­saient sous la fron­tière égyp­tienne ont été" détruits au bull­dozer ou inondés, y compris par les eaux des égouts ", par l'armée égyp­tienne. Pourtant, quand on lui pose la question du ravi­taillement mili­taire du Hamas par ses tunnels stra­té­giques, il affirme qu'il est " légitime de faire entrer des armes, pour résister à l'occupant israélien ".

A en croire Zoher Al-​​Kotati, qui tient bou­tique rue Al-​​Bahar, la très indus­trieuse " rue de la mer ", prin­cipale artère de cette ville fron­ta­lière de 120000 habi­tants, ce n'est pas la seule entorse à la vérité. La seule mar­chandise qui arrive encore d'Egypte, explique-​​t-​​il, ce sont les ciga­rettes, " parce que le Hamas prélève 1 shekel - 21 cen­times d'euro - de taxe sur chaque paquet de 7 shekels ". Pour le reste, à l'exception des armes et, semble-​​t-​​il, de l'essence réservée au Mou­vement de la résis­tance isla­mique, plus rien n'entre. Du moins par les tunnels, les­quels ache­mi­naient plus de 60 % des mar­chan­dises dis­po­nibles dans la bande de Gaza (par ailleurs tou­jours sous blocus israélien), à com­mencer par les maté­riaux de construction, dont les prix ont grimpé de 40 %. Résultat : la plupart des chan­tiers privés sont arrêtés, en par­ti­culier ceux qui béné­fi­ciaient d'un finan­cement du Qatar.

Zoher Al-​​Kotati montre ses éta­lages, et désigne des barres de cho­colat et des bou­teilles de Coca-​​Cola : " Tout cela vient encore d'Egypte, mais cela arrive désormais par Kerem Shalom - seul point de passage avec Israël pour les mar­chan­dises - , avec comme consé­quence une aug­men­tation des prix de 50 %. " Comme la plupart des com­mer­çants de la bande de Gaza, il estime que ses revenus ont été diminués d'au moins 30 %, notamment en raison de la hausse du coût de l'énergie. Sur une étagère trône le fameux "UPS1000 watts ", ce chargeur de bat­terie qui détrône de plus en plus les géné­ra­teurs ali­mentés à l'essence ou au fioul, deux car­bu­rants de plus en plus introuvables.

Mais charger un "UPS" n'est pas si simple, alors que les 1,7 million de Gazaouis ne dis­posent plus que de 6 heures d'électricité par jour, depuis que la seule cen­trale élec­trique qui ali­mente l'enclave pales­ti­nienne s'est arrêtée de fonc­tionner, le 1er novembre. La filière égyp­tienne, qui ache­minait jusqu'à400000 litres de fioul par jour, s'est inter­rompue avec la des­truction des tunnels de contre­bande. La cen­trale four­nissait 65 méga­watts à la bande de Gaza, qui achète par ailleurs 120 méga­watts à Israël et 27 méga­watts à l'Egypte. En tout, quelque 210 méga­watts, pour des besoins estimés à environ 340 méga­watts, voire 400 méga­watts pendant les mois d'hiver… Ce qui signifie que le ter­ri­toire pales­tinien souffre d'un manque chro­nique d'électricité.

Les consé­quences pour les hôpitaux, les morgues, la conser­vation des pro­duits frais, l'enlèvement des ordures, le pompage de l'eau douce et des eaux usées, mais aussi pour l'éducation, bref pour la vie quo­ti­dienne des Gazaouis, deviennent chaque jour plus dras­tiques. A l'origine de cette crise éner­gé­tique, il y a éga­lement une cause poli­tique : l'Autorité pales­ti­nienne, confrontée elle aussi à des dif­fi­cultés finan­cières chro­niques, a réimposé une taxe sur chaque litre de fioul vendu au gou­ver­nement du Hamas, soit une hausse de 4,2 shekels à5,7 shekels le litre. Réponse du premier ministre, Ismaël Haniyeh : nous n'avons plus les moyens de payer une telle facture.

Omar Shaban, qui dirige, à Gaza, le centre d'études poli­tiques Pal-​​Think, estime que le com­merce des tunnels repré­sentait, par les taxes pré­levées sur toutes les mar­chan­dises, 50 % du budget du Hamas. Le maire de Rafah, qui est un fonc­tion­naire nommé par le Hamas, évalue à quelque 30000 le nombre des tun­ne­liers privés d'emploi, et assure que "65 % de la popu­lation de Gaza était, d'une manière ou d'une autre, concernée par le com­merce des tunnels ". Les 360 employés muni­cipaux n'ont pas été payés depuis quinze jours, un sort presque enviable par rapport à celui des fonc­tion­naires du gou­ver­nement, les­quels n'ont pas touché de salaire depuis deux mois.

Sobhi Redwan indique que 3 % seulement des habi­tants de Rafah ont payé leurs fac­tures d'eau et d'électricité en octobre, contre 25 % il y a quelques mois. L'autre pré­oc­cu­pation du maire de Rafah, c'est la fer­meture du check­point à la fron­tière égyp­tienne : lorsqu'il est ouvert, c'est pour laisser sortir entre 150 et 300 voya­geurs par jour. M. Redwan se plaint de la bru­talité crois­sante des gardes fron­tières égyp­tiens envers les Gazaouis et du déve­lop­pement de cet autre " com­merce fron­talier " : il en coûte 1000 dollars (743 euros) de bak­chich pour convaincre les soldats égyp­tiens de fermer les yeux sur l'absence de document officiel pour quitter Gaza.


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