
Alors que la communauté internationale réfléchit à différents plans de reconstruction de la bande de Gaza, nous constatons que toutes les options proposées ne tiennent pas compte du droit légal des Palestiniens à des réparations. Ces plans proposés (par la Ligue arabe et les États-Unis), bien que formulés dans le langage de la « paix » et de la « stabilité», reflètent en fin de compte une continuation de l'échec historique de la communauté internationale à faire respecter les droits inaliénables du peuple palestinien, y compris les droits au retour et à l'autodétermination, et à s'attaquer aux causes profondes de la dépossession palestinienne : la colonisation, le déplacement forcé et l'apartheid. Présenter la « reconstruction » comme un substitut à la réparation révèle une vision de l'avenir de Gaza façonnée non pas par les aspirations de son peuple et les principes du droit international, mais par les intérêts géopolitiques coloniaux des puissances régionales et internationales.
Les réparations peuvent prendre de nombreuses formes, notamment : la restitution (c'est-à-dire le rétablissement des détenteurs de droits dans leur situation initiale avant la violation), l'indemnisation (c'est-à-dire la réparation financière d'une perte économiquement accessible), la réhabilitation (médicale, psychologique, juridique et sociale) et la satisfaction (cessation des violations, recherche de la vérité, excuses publiques, sanctions judiciaires, etc.) Ces mesures peuvent être définies de manière générale comme la réparation du préjudice causé au titulaire des droits d'une manière adéquate, efficace, rapide et proportionnée. Il est essentiel de noter que la reconstruction peut, et doit, faire partie de la stratégie de réparation au sens large, mais elle doit être comprise dans ce cadre fondé sur les droits, par opposition à la « charité» proposée par la communauté internationale dans ses plans.
Ces plans sont profondément erronés car ils considèrent, au mieux, la solution à deux États comme le seul horizon de l'avenir palestinien. Ce faisant, le plan de la Ligue arabe réduit la question de la Palestine à un problème humanitaire et à un différend territorial étroit le long des frontières de 1967, ignorant l'injustice fondamentale de la Nakba de 1948 et l'exil permanent de millions de réfugiés palestiniens. Dans le pire des cas, le plan américain préconise le nettoyage ethnique complet des Palestiniens de Gaza. Quel que soit le plan analysé, l'approche internationale actuelle de la « reconstruction » est imposée contre la volonté et les droits du peuple palestinien. En revanche, une approche axée sur les réparations met l'accent sur les droits des Palestiniens, demande des comptes à l'auteur du crime et sert de moyen de dissuasion pour empêcher la répétition d'atrocités et de crimes internationaux.
Parmi tous les plans proposés pour la reconstruction, il convient de noter que le mot « réparations » n'est pas mentionné une seule fois. Il n'y a nulle part de tentative sérieuse de rendre justice pour plus de sept décennies de dépossession, de déplacement, de siège et de répression. Alors que la reconstruction doit être un élément constitutif des réparations, elle est présentée dans ces plans non pas comme un droit dû, mais comme un processus conditionnel géré par des technocrates, des donateurs et des institutions internationales - des entités historiquement complices de l'asservissement des Palestiniens. Ces conditions, imposées par l'auteur de ces crimes, le régime israélien, sont multiples et restrictives. Elles limitent les droits fondamentaux et démocratiques des Palestiniens et les soumettent à un chantage en échange d'une éventuelle aide caritative. En outre, le traitement de la résistance armée palestinienne comme un simple « défi »à résoudre par des processus politiques et sécuritaires imposés occulte la réalité selon laquelle la résistance naît de l'exclusion de la volonté du peuple palestinien, conjointement à l'absence de justice, de liberté et de décolonisation, et qu'elle est un droit consacré par le droit international. Désarmer la résistance sans démanteler les structures d'oppression reproduit la logique de la pacification et non de la libération.
L'exigence qu'« Israël » - en tant qu'auteur de crimes internationaux et principal agent de la destruction de Gaza - assume la responsabilité financière de la reconstruction de Gaza est cruellement absente de tout plan de reconstruction. En vertu du droit international, « Israël », en tant que régime colonial-apartheid et auteur d'un génocide contre les Palestiniens de Gaza, a clairement l'obligation de fournir des réparations pour les immenses dégâts matériels et humains qu'il a causés. Le fait de compter sur les donateurs internationaux, les investissements étrangers et la société civile palestinienne pour financer la reconstruction de Gaza non seulement exonère le régime israélien de ses responsabilités juridiques et morales, mais crée un dangereux précédent dans lequel la commission de crimes internationaux est subventionnée par ses victimes et la communauté internationale. Si la communauté internationale a l'obligation de protéger le peuple palestinien et ses droits inaliénables, le fardeau de la réparation et de la reconstruction devrait reposer en premier lieu sur les épaules du régime israélien et des États coloniaux qui continuent de collaborer au génocide. Cela signifie que la charge financière de la reconstruction devrait être principalement supportée par le régime et ceux qui sont complices de ses crimes et devrait être considérée comme l'un des piliers de la responsabilité nécessaire pour garantir la revendication des droits des Palestiniens. Au-delà de la simple responsabilité financière, les auteurs doivent être tenus de rendre compte de leurs crimes et faire face à la justice devant un tribunal.
La reconstruction sans réparation n'est pas la justice. La reconstruction sans retour complet n'est pas une libération. Les plans de la communauté internationale reflètent un consensus mondial visant à gérer les souffrances des Palestiniens plutôt qu'à y mettre fin. Les réparations exigent non seulement la reconstruction de Gaza en tant que ghetto au sein d'un pseudo-État fragmenté, mais aussi le démantèlement des structures de la domination coloniale, le retour intégral des réfugiés palestiniens et la réalisation des droits collectifs des Palestiniens, y compris leur droit inaliénable à l'autodétermination - pas simplement de « rester » - mais de retourner, de reconstruire et de réclamer toute la Palestine historique.
Traduction : AFPS
Photo : Vue aérienne de Rafah, avril 2025 © Réseaux sociaux
Publié par : BADIL