La pire particularité des Nations unies est le veto. Il condamne régulièrement l'Organisation à une impuissance majeure. Il est vain d'accuser la Russie et la Chine de cynisme sans bornes. Elles ne sont pas différentes des autres grandes puissances. Les Etats-Unis ont utilisé le veto de nombreuses fois, spécialement pour protéger Israël.
SI je suivais le cri de mon cœur, j'appellerais notre gouvernement à envoyer l'armée israélienne en Syrie, à ramener le gang Assad de Damas, à remettre le pays à l'opposition syrienne ou aux Nations unies, et à rentrer.
Cela ne serait même pas très difficile.
Damas n'est qu'à quelques dizaines de kilomètres des positions de l'armée israélienne sur les Hauteurs du Golan.
L'armée syrienne est occupée à tirer sur son propre peuple. Si elle retournait ses armes contre nous, les insurgés rentreraient rapidement à Damas et termineraient le travail eux-mêmes.
Quoiqu'il en soit, le monstre serait délogé.
Ne serait-ce pas merveilleux ?
OUI, mais, hélas, c'est une idée complètement folle.
Avant tout, parce que les Syriens, y compris les insurgés, nous haïssent probablement encore plus qu'ils haïssent Bachar
Si les soldats israéliens passaient la frontière, les Syriens s'uniraient derrière leur armée et arrêteraient l'insurrection.
Pour l'ensemble du monde arabe, Israël est le disciple du diable. Même les pays arabes qui, comme l'Arabie Saoudite, aident l'armée libre de Syrie, devraient y réfléchir à deux fois. Si Israël soutient quelque groupe arabe que ce soit, aussi progressiste et patriote soit-il, c'est le baiser de la mort.
C'est pour cette raison que même un soutien verbal serait fatal. Certains aimeraient que le gouvernement israélien appelle le président Barack Obama ou les Nations unies à intervenir. Cela serait une erreur et aiderait Bachar et ses copains à traiter les rebelles d'agents américains et de comparses sionistes.
Alors que peut faire Israël pour aider le peuple d'à côté qui souffre ?
Rien. Absolument rien.
Ni intervention militaire, ni effort diplomatique, pas même un geste de solidarité.
AU LIEU DE CELA, NOUS devrions méditer sur les raisons qui font que nous sommes dans cette situation déplorable.
Il fut un temps où les peuples du monde arabe n'aimaient pas Israël mais ils croyaient ce qu'Israël disait. Même quand on détestait les déclarations de l'armée israélienne, on les croyait. Ces jours sont révolus.
Si l'armée israélienne annonçait qu'elle entre en Syrie pour la débarrasser de son dictateur, et qu'elle se retirerait immédiatement après, les gens rigoleraient. Israël ? Retrait ? Israël est entré au Liban en 1982 pour “libérer des terroristes palestiniens une zone de 40 kilomètres”, et il a mis 18 ans à partir – et cela seulement après avoir perdu une guerre de guérilla intensive. Israël a occupé les Hauteurs du Golan syrien en 1967 et n'a montré aucune intention de les quitter un jour.
Si Israël faisait quelque chose au sujet de la situation en Syrie – quoi que ce soit – le monde entier se demanderait : Que concoctent ces Israéliens ? Quels sont leurs desseins cachés ?
Qui serait assez naïf pour compter sur un pays qui a un Avigdor Liberman comme ministre des Affaires étrangères et un Ehoud Barak à la Défense, sans parler d'un Benjamin Nétanyahou comme Premier ministre, pour faire une chose altruiste ?
Alors abandonnons l'idée.
CEPENDANT, comment puis-je rester sans rien faire pendant que à moins de 300 kilomètres de ma maison – plus proche qu'Eilat – des choses terribles sont en train de se passer ?
Ceci ne concerne pas seulement un Israélien. C'est une question qui se pose pour tout être humain dans le monde.
Que nous soyons Israélien ou Norvégien, Brésilien ou Pakistanais, nous, citoyens de ce monde, sommes assis devant nos écrans de télévision à regarder avec horreur les images venant de Homs et à nous demander avec un désespoir grandissant : Sommes-nous totalement impuissants ? Le monde est-il totalement impuissant ?
Il y a 70 ans, nous accusions le monde de ne pas lever le petit doigt quand des millions de Juifs, de Roms, et autres étaient tués par Einsatzgruppen et dans les chambres à gaz. Mais c'était au sein d'une terrible guerre mondiale, alors que l'Occident et lUnion soviétique faisaient face à la machine de guerre nazie d'une efficacité redoutable, dirigée par l'un des grands tyrans de l'Histoire.
Alors qu'ici nous sommes aujourd'hui face à un dictateur de pacotille dans un petit pays, qui est en train de massacrer son propre peuple, et toujours incapable de l'arrêter.
CECI NOUS va bien au-delà des terribles événements de Syrie.
L'impuissance de la communauté mondiale – appelée de façon euphémique “la famille des nations” – de faire quelque chose dans une telle situation est criante.
La vérité est que, au début du troisième millénaire, à l'heure de la globalisation économique et des réseaux de communication instantanée, le système politique international est toujours resté des siècles en arrière.
Après la terrible Première Guerre Mondiale, la Société des nations a été créée. Mais l'orgueil des vainqueurs et leur désir de vengeance à l'égard des vaincus les ont conduit à mettre en place une structure défectueuse qui s'écroula à la première épreuve.
Après la Seconde Guerre Mondiale, encore plus terrible, les vainqueurs essayèrent d'être beaucoup plus réalistes. Mais la structure qu'ils ont créée, l'Organisation des Nations unies, a d'autres défauts. La crise syrienne les met en pleine lumière.
La pire particularité des Nations unies est le veto. Il condamne régulièrement l'Organisation à une impuissance majeure.
Il est vain d'accuser la Russie et la Chine de cynisme sans bornes. Elles ne sont pas différentes des autres grandes puissances. Les Etats-Unis ont utilisé le veto de nombreuses fois, spécialement pour protéger Israël. La Russie et la Chine servent ce qu'ils estiment être leurs intérêts à court terme, et au diable les victimes. Horrible, dégoûtant, mais banal. L'Histoire est pleine d'exemples. L'accord de Munich et le Pacte entre Hitler et Staline viennent facilement à l'esprit.
Mais le mauvais veto russe contre une inoffensive résolution du Conseil de sécurité sert-il vraiment un réel intérêt russe ? Je pense que Moscou devrait avoir un peu plus de bon sens. Leurs ventes d'armes à la Syrie entrent peu en considération. De même que la base navale russe à Tartous. Il me semble que c'est plutôt un réflexe conditionné : Si quelque chose est soutenu par les Etats-Unis, ce doit être mauvais. Après tout, Ivan Petrovitch Pavlov était russe.
Ce qui est peut-être plus important, c'est la peur russe et chinoise de créer un autre précédent pour une intervention étrangère dans des affaires intérieures telles que des massacres, la tyrannie et un mini-génocide.
Mais à long terme, il ne peut pas être de l'intérêt de la Russie de se barricader derrière un mur de cynisme. Un “respect convenable pour l'Humanité”, comme l'a formulé Thomas Jefferson, semble beaucoup plus moderne que le “Le Pape ? combien de divisions ?” de Staline.
A ce propos, il serait bon pour Israël qu'il respecte aussi la règle de Jefferson.
BACHAR AL-ASSAD nous apprend qu'il est nécessaire de procéder à une totale révision de la Charte de l'ONU. Cette révision doit commencer avec le véto.
La répartition du pouvoir telle qu'édictée dans la Charte est ridiculement obsolète. Pourquoi la Chine et pas l'Inde ? Pourquoi la France et pas l'Allemagne ?
Mais c'est un point mineur. Le point majeur est qu'il est intolérable qu'un pouvoir, ou même plusieurs, bloque(nt) la volonté de toute l'humanité. Aujourd'hui, l'ONU est un véritable Vétostan.
Si le veto ne peut pas être supprimé du tout, comme il devrait l'être, un mécanisme devrait être trouvé pour le limiter dans des cas sensibles. Par exemple : une majorité de 75% dans l'Assemblée générale, ou un vote unanime de tous les membres n'ayant pas le droit de veto au Conseil de sécurité pourrait passer outre le veto.
Dans un tel cas, les Nations unies, avec un nouveau type de secrétariat général, pourraient appeler les armées d'Etats membres à mettre fin à des crimes contre l'humanité n'importe où, rendant l'intervention d'organisations comme l'OTAN superflue.
Ce ne sont pas des forces extraordinaires qui sont nécessaires en Syrie. Des troupes égyptiennes et turques, en coordination avec l'Armée syrienne libre, suffiraient.
HAFEZ AL-ASSAD, le dictateur syrien qui a régné longtemps, désigna son fils Bachar comme héritier, après la mort de son fils ainé dans un accident d'avion.
Le gentil médecin ophtalmologiste fut accueilli avec soulagement. Il semblait le modernisateur idéal, avec des idées progressistes, peut-être même démocratiques. Aujourd'hui il montre que dans toutes les dictatures se tapit un monstre caché.
Assad signifie “lion'. Mais Bachar n'est pas un lion. Il est plutôt comme une hyène – un animal que l'on appelle en yiddish “la bête rieuse”. Il n'y a pas de quoi rire.
Son temps est fini.
[Traduit de l'anglais “The Laughing Beast” pour l'AFPS : SW]