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Mon­sieur le Ministre des Affaires Etran­gères, la France doit recon­naitre l'Etat de Palestine et sou­tenir son admission à l'ONU

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Le peuple pales­tinien est lassé d'entendre des pro­messes qui demeurent sans suite. Il ne donne plus aucun crédit aux paroles de « soutien » et autres « condam­na­tions » qui ne sont jamais accom­pa­gnées d'actes. Il ne peut plus sup­porter de voir sa terre confisquée pour y construire des colonies en expansion continue. Il pense qu'il faut moins d'indulgence à l'égard des posi­tions, inso­lemment hors le droit inter­na­tional, du gou­ver­nement israélien. Il faut des actes, plus seulement des mots.

Paris, le 24 mai 2012

_​ M. Laurent Fabius
Ministre des Affaires étran­gères
37, quai d'Orsay
75007 Paris

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères,

Permettez-​​moi tout d'abord de vous féli­citer pour votre nomi­nation à la haute res­pon­sa­bilité de Ministre des Affaires étrangères.

Dès le 18 Mai, dans « Paris-​​Normandie », vous avez déclaré : « Pour définir notre poli­tique étrangère, vous entendrez fré­quemment dans ma bouche deux mots : influence et cohé­rence. (…) Influence en appli­quant nos prin­cipes, le déve­lop­pement durable, la paix, le respect de la per­sonne humaine. C'est cette influence qu'il faut déve­lopper. Cela n'est pos­sible qu'en étant cohé­rents dans l'action, la régu­lation inter­na­tionale et cohé­rents dans nos choix politiques. »

Ces mots retiennent for­tement l'attention de celles et ceux qui attendent une poli­tique inter­na­tionale nou­velle de la France – une poli­tique qui soit cohé­rente, résolue et active au service de la paix, du droit inter­na­tional et des droits de l'Homme ; une autre poli­tique qui corrige celle pra­tiquée par cer­tains de vos pré­dé­ces­seurs qui a causé beaucoup de tort à la France, à son indé­pen­dance de décision et à son image dans le monde ; une poli­tique qui doit réparer, en par­ti­culier, les dégâts causés par la sous-​​estimation des aspi­ra­tions des peuples arabes à la liberté et à la démo­cratie ; une poli­tique qui doit être spé­cia­lement à l'écoute des attentes légi­times du peuple pales­tinien dans sa longue quête de ses droits nationaux. Le trai­tement de la question pales­ti­nienne est vécu par les peuples arabes comme l'exemple type de la poli­tique des « deux poids, deux mesures » à laquelle il faut mettre un terme pour donner espoir et justice à tous ces peuples.

La situation au Proche-​​Orient doit revenir au centre de la poli­tique étrangère de la France, car non seulement injuste, elle est aussi por­teuse de tous les dangers.

La tra­gédie du peuple pales­tinien dure depuis des décennies avec son lot de souf­frances, d'expulsions, d'humiliations et de pri­va­tions de ses droits les plus élémen­taires. Chaque année qui passe rend la solution du conflit encore plus difficile.

Car, sur le terrain, les auto­rités israé­liennes œuvrent au quo­tidien pour rendre impos­sible toute solution à deux États. Seule solution à la fois sou­haitée par la com­mu­nauté inter­na­tionale et qui peut rendre justice au peuple pales­tinien tout en garan­tissant la sécurité de tous. C'est aussi, notons-​​le, sui­ci­daire pour Israël.

Le peuple pales­tinien est lassé d'entendre des pro­messes qui demeurent sans suite. Il ne donne plus aucun crédit aux paroles de « soutien » et autres « condam­na­tions » qui ne sont jamais accom­pa­gnées d'actes. Il ne peut plus sup­porter de voir sa terre confisquée pour y construire des colonies en expansion continue. Il pense qu'il faut moins d'indulgence à l'égard des posi­tions, inso­lemment hors le droit inter­na­tional, du gou­ver­nement israélien. Il faut des actes, plus seulement des mots.

Vous aviez, Mon­sieur le Ministre, annoncé lors de la convention du Parti Socia­liste qui s'est tenue le 9 octobre 2010, la rupture de la poli­tique que vous pro­posez avec celle, com­plai­sante, du gou­ver­nement pré­cédent. Vous déclariez alors : « De la même façon, on nous avait dit sur le conflit israélo-​​palestinien : à coup sûr, la France aura une position équi­librée. Vous avez vu la réalité, qui bien sûr dans un pro­blème extrê­mement délicat, doit nous mener tout de même à consi­dérer qu'il y a une indul­gence excessive à l'égard des posi­tions du gou­ver­nement israélien dont il faut à nouveau dire qu'il devra rapi­dement faire en sorte de quitter les ter­ri­toires colo­nisés. » Vos paroles ont eu d'autant plus de force cette position a été una­ni­mement adoptée par cette Convention.

Après avoir constaté que la France renvoie depuis 2007 un message souvent brouillé concernant le conflit israélo-​​palestinien, la réso­lution adoptée par cette même Convention consi­dérait que : « Confor­mément aux réso­lu­tions des Nations Unies et à la position que défend l'Union euro­péenne, notamment pour la levée du blocus de Gaza, Israël devra pouvoir béné­ficier du droit à exister en paix et en sécurité et les Pales­ti­niens à un État viable. Ces droits devront être garantis. Israël doit mettre fin dès main­tenant à la colo­ni­sation dans les ter­ri­toires pales­ti­niens. Nous accom­pa­gnerons les ini­tia­tives prises en ce sens pour trouver enfin une solution paci­fique et durable. Nous sommes convaincus que tout progrès durable passera par le dia­logue avec l'ensemble des protagonistes. ».

Ce sont effec­ti­vement ces réso­lu­tions des Nations unies aux­quelles vous faites réfé­rence, le droit inter­na­tional et la légalité inter­na­tionale qui consti­tuent le socle de l'offre de paix pales­ti­nienne. Cette offre remonte à 1988 et propose la création de l'Etat pales­tinien sur seulement 22% de la Palestine his­to­rique au lieu des 46% ini­tiaux prévu en 1947.

Il y avait là une concession majeure consi­dé­rable faite par les Pales­ti­niens qui croyaient que la com­mu­nauté inter­na­tionale allait s'empresser du même coup de mettre en appli­cation cette solution. La déception pales­ti­nienne a été totale car c'est l'inverse qui s'est produit : plus de colo­ni­sation, plus d'expropriation de terres, plus d'enfermement et de blocus et, comme un encou­ra­gement offert à Israël, une impunité assortie de « primes », telles celle de son admission à l'OCDE ou encore les ten­ta­tives répétées pour rehausser son statut auprès de l'UE sans parler de la non-​​application de l'Accord d'association UE-​​Israël en vigueur depuis l'an 2000 qui subor­donne son appli­cation au respect des droits humains fon­da­mentaux. L'offre de paix pales­ti­nienne de sur­croît été ren­forcée par l'« Ini­tiative de paix arabe » pro­posée à Bey­routh en 2002, et renou­velée à plu­sieurs reprises.

Cette ini­tiative, qua­lifiée à l'époque de « sérieuse » par l'ensemble de la com­mu­nauté inter­na­tionale, est resté lettre morte face à l'incroyable intran­si­geance israé­lienne. Elle réclamait « l'acceptation de la création d'un Etat indé­pendant sur les ter­ri­toires pales­ti­niens occupés depuis 1967 en Cis­jor­danie et dans la bande de Gaza, avec pour capitale Jérusalem-​​Est ». « En contre­partie », les pays arabes conclu­raient un accord de paix et établiront des rela­tions nor­males avec Israël « dans le cadre d'une paix globale ».

Israël, comme tous les autres États membres de l'ONU, doit res­pecter le droit et les lois inter­na­tio­nales et cesser de se com­porter comme un État, le seul en ce cas, qui se situe en toute impunité et de façon per­ma­nente au-​​dessus du droit.

Les Pales­ti­niens ne peuvent pas, comme vous pouvez l'imaginer Mon­sieur le Ministre, accepter que soit qua­lifiée de « pré­ma­turée » leur demande d'admission à l'ONU. Ils ne peuvent non plus, après dix-​​huit années de ten­ta­tives sin­cères et sérieuses de leur côté, continuer à négocier avec un par­te­naire qui ne cède rien, accélère la colo­ni­sation et n'a que mépris pour leurs reven­di­ca­tions justes pourtant uni­ver­sel­lement reconnues.

Vous avez trouvé plu­sieurs rap­ports émanant des chan­cel­leries occi­den­tales à Jéru­salem. Des rap­ports qui décrivent par­fai­tement les réper­cus­sions désas­treuses de la colo­ni­sation, du mur d'annexion, de l'occupation, de la judaï­sation forcée de Jéru­salem sur les condi­tions de vie des Pales­ti­niens sur le plan social, écono­mique et poli­tique. Ces rap­ports, accom­pagnés souvent de recom­man­da­tions, ont été classés sans suite jusqu'à présent.

Nous comptons sur votre déter­mi­nation, Mon­sieur le Ministre, pour mettre en appli­cation ce que les Chefs de mis­sions euro­péens à Jéru­salem pré­co­nisent pour sauver les chances d'une paix mises à mal par la poli­tique israélienne.

Permettez-​​nous de croire, Mon­sieur le Ministre, que votre autorité vous met en situation, d'œuvrer pour que la France fasse un geste fort, celui de la recon­nais­sance de l'État de Palestine et sou­tienne son admission à l'ONU. En rejoi­gnant les quelque 126 pays qui l'ont déjà fait, la France retrouvera la confiance des peuples de la région. Et, sans attendre, elle doit recon­naitre la Palestine et conclure avec elle un solide accord de par­te­nariat, un « Accord d'amitié ». Sur cette voie la France retrou­verait crédit et influence et per­met­trait enfin, par des actes tan­gibles, que la paix avance dans l'intérêt de tous les peuples concernés.

Je vous prie de croire, Mon­sieur le Ministre, à l'expression de mes salu­ta­tions les plus distinguées.

_​ Jean-​​Claude Lefort
Député honoraire
Président de l'AFPS


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